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785. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

Celui-ci est un vrai philosophe ; il connaît l’Antiquité, et il a puisé à ses plus hautes sources. […] Il est bien vrai que ces poèmes sont le produit d’un état moral et primitif dans lequel, avant tout, il est besoin de se replacer pour bien se rendre compte, sinon de leur charme qui se sent de lui-même, dit moins de leur mérite ; autrement on est sujet à leur prêter, après coup, quantité d’intentions et de beautés réfléchies qui ne sont, à vrai dire, que des reflets de notre propre esprit, des projections de nous-mêmes, de pures illusions de perspective. […] Pourtant on n’est pas également dans le vrai à tous les points de vue où l’on se place ; autre chose est de juger Homère avec Eustathe et Mme Dacier, autre chose avec Ottfried Müller. […] Le vrai d’hier, déjà incomplet ce matin, sera demain tout à fait dépassé et laissé derrière. […] Il y a (il faut bien le dire) des esprits distingués, mais essentiellement modernes et présents qui restent et resteront à jamais fermés à l’intelligence et au vrai sentiment de l’Antiquité, et qu’il faut désespérer d’y convertir.

786. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Guizot48, un travail datant de 1813, réimprimé en 1852 avec corrections et additions, et dans lequel l’éminent auteur, sans tant creuser, sans tant raffiner et renchérir qu’on l’a fait depuis, a su rassembler dans un juste cadre et dans une proportion raisonnable les idées vraies, les considérations importantes et les documents intéressants qui font connaître une grande nature de poète. […] Il prête à ses vieux héros tout ce qu’il a de noble dans l’imagination, et vous diriez qu’il se défend l’usage de son propre bien, comme s’il n’était pas digne de s’en servir. » Tout cela admis et reconnu, il restera vrai d’accorder à M.  […] Or, on sait précisément, par une note des papiers de Conrart, que ce n’était pas une vraie marquise ni une femme du monde, mais une comédienne qu’on avait surnommée ainsi pour ses grands airs, Mlle Du Parc, dont les deux Corneille, Pierre et Thomas, pendant un séjour qu’elle fit à Rouen, avaient raffolé à l’envi. […] Il est bien vrai que, plus d’un siècle après, dans le recueil de Pièces intéressantes, donné par La Place, on lit les Stances de Corneille tronquées et sous ce titre : La comtesse de … à la marquise de … Mais qu’est-ce que cela prouve, et la publication d’un éditeur de la fin du xviiie  siècle peut-elle prévaloir contre celle qui fut faite du temps de Corneille et de son aveu ? […] Je transcris le passage du Mémorial où se trouve pour la première fois le mot qui a tant couru et qui, dans sa version vraie, est digne de Corneille lui-même : « La haute tragédie, disait l’Empereur à l’un de ses couchers à Saint-Cloud, est l’école des grands hommes.

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