Et nous aussi, nous avons avec l’Angleterre, cette fois, notre vraie paix d’Amiens. […] Chateaubriand, dans la première préface de son livre, touchait le point de sa conversion, car il n’avait pas toujours été religieux ; loin de là : lié avec les hommes de lettres de la fin du xviiie siècle, Chamfort, Parny, Le Brun, Ginguené, il s’était montré à eux tel qu’il était, lorsque, disciple de Jean-Jacques, il allait étudier la nature humaine plus vraie, selon lui, et supérieure chez les sauvages d’Amérique, dans les forêts du Canada. […] Un document curieux existe, je l’ai sous les yeux, et j’en puis parler en toute connaissance de cause : il nous livre l’état vrai, et trop vrai, des opinions, des croyances et de l’âme de Chateaubriand à la date de 1798, quelques mois seulement avant sa conversion et avant la conception première du Génie du christianisme. […] L’auteur du Génie du christianisme nous a dit vrai, suffisamment vrai dans sa préface, et ce livre a été entrepris en effet et en partie exécuté sous le genre d’inspiration qu’il exprime et qu’il tend à consacrer.
De même, dans la harangue de Henri IV à l’assemblée des notables de Rouen, Voltaire semblait prendre au pied de la lettre cette gracieuse et débonnaire promesse de se mettre en tutelle entre leurs mains, tandis que Henri entendait bien ne faire là qu’une politesse ; et comme Gabrielle, au sortir de cette séance, s’étonnait qu’il eût ainsi parlé de se mettre en tutelle : « Il est vrai, répondait-il, mais, ventre saint-gris ! […] Aujourd’hui on est rentré dans une voie plus large ; l’abondance des faits recueillis a remis chaque portion du caractère dans son vrai jour ; l’anecdote n’y est plus supprimée par l’histoire et ne la prime pas non plus. […] Chéruel établit et entoure de preuves dans sa récente et louable Histoire de l’administration monarchique en France, on ne voit rien à désirer d’essentiel : on possède un Henri IV vrai, dans l’équilibre de ses qualités et dans son ensemble ; on a fait, pour ainsi dire, le tour du personnage. […] Il parle, il est vrai, la meilleure des langues, et comme un roi qui méritait d’avoir Pellisson pour secrétaire et Racine pour lecteur. […] Jung a très bien saisi ce caractère du talent de Henri IV, si l’on peut ainsi parler, et ce mélange de saillie spirituelle, d’imagination rapide et de cœur. « Pour moi, écrit Henri à la reine Élisabeth (15 novembre 1597), je ne me lasserai jamais de combattre pour une si juste cause qu’est la nôtre ; je suis né et élevé dedans les travaux et périls de la guerre : là aussi se cueille la gloire, vraie pâture de toute âme vraiment royale, comme la rose dedans les épines.