Hérodote et de la manière de le traduire1 [1827] Un homme de beaucoup d’esprit, qui savait supérieurement le grec, et qui avait fait de notre langue une étude particulière et curieuse, a traduit avec soin la moitié d’un livre d’Hérodote, et n’a pas réussi : voilà certes un préjugé tout fait et un argument a priori, contre toute entreprise pareille. Cependant, si l’entreprise manquée par M. Courier2 le fut, pour ainsi dire, à dessein ; si l’écrivain ni la langue n’ont failli, mais seulement le système, alors l’exemple n’est plus décisif. Le savant et spirituel helléniste, le Swift de l’érudition, et le Lucien du pamphlet politique avait cela de singulier, parmi les érudits, qu’il connaissait à fond tous les tours et tous les détours de notre langue, qu’il l’avait, pour ainsi dire, apprise par cœur, comme une langue morte, et la savait d’instinct, comme une langue vivante : mais cette connaissance profonde, et si rare de nos jours, lui avait donné le goût du vieux langage, des formes surannées, des idiotismes. Comme ces tours anciens ont quelque chose de naïf, il avait pensé que l’emploi en paraîtrait toujours naturel, et il écrivait artificiellement avec des paroles simples, négligées, à la vieille française.
On tirerait des comédies du temps un volume de sentences ; elles sont pleines de morceaux littéraires qui annoncent déjà le Spectator 603.