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583. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

. — Mademoiselle Doze Nous étions donc réunis tous les trois, chacun de nous rêvant à quelque tristesse cachée ; dans la cheminée le feu était vif, au ciel le soleil était pâle ; le dimanche jetait son froid et son silence dans la ville. — Allons, leur dis-je, vous êtes heureux, vous autres, chantez ou rêvez à votre aise ; moi, il faut que je raconte mon histoire de chaque semaine. […] Le paravent représente tour à tour le palais et la chaumière ; le grand fauteuil joue le rôle du père qui gronde toujours ; la chaise de paille vous représente la soubrette alerte et vive, le guéridon, posé sur un pied, saluez ! […] Il a tort et grand tort de nommer en toutes lettres son ennemi Boursault, comme il aura tort, plus tard, de mettre l’abbé Cottin tout vif dans Les Femmes savantes ; il ne faut pas tuer les gens à coups de massue, un petit coup d’épingle, à la bonne heure ; et puis si vous tuez votre homme aujourd’hui que vous restera-t-il le lendemain ? […] Mademoiselle Duparc, envieuse et jalouse, c’était la prude Arsinoé ; mademoiselle de Brie, indulgente et dévouée, sera plus tard la sage Éliante ; mademoiselle Molière, vive, agaçante, coquette, est déjà Célimène, et le Misanthrope, ne le reconnaissez-vous pas dans Molière ?

584. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Elle avait les yeux bleu vif d’un chef d’armée, un air de commandement et de décision que tempéraient l’humilité acquise et la finesse naturelle de la femme. […] Je dirai même que je les crois nécessaires, mais à une condition, qui est de ne jamais les relire, à moins d’y être invité par l’appel immédiat du sujet, par la rencontre qui se fait, dans l’esprit, du geste logique d’un personnage avec le geste autrefois vu et saisi au vif de la nature. […] Nos couleurs sont riches, vives ; les mélanges de tons ont fait sa réputation par leur hardiesse ; on ne recule devant aucun mélange extraordinaire, on heurte, on oppose : mais tout cela en artiste. […] Chez madame X., on doit forcément devenir dessinateur de goût, et le goût doit être discret, fin, tandis que chez nous l’œil le plus terne devra s’habituer et finir par aimer les couleurs vives, et le goût le plus timoré deviendra hardi et original. » On pourrait croire que ce ne sont là que de jolis mots, et que le souci de l’art qu’elles savent exprimer est de bien petite importance dans la vie de ces jeunes filles obligées de travailler pour vivre.

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