Les flottes de Venise transportèrent les croisés à Jérusalem ; ses colonies marchandes, établies jusque dans Constantinople comme des postes avancés, y construisaient des forteresses et des tours ; Des envoyés de la France venaient plaider humblement dans l’église de Saint-Marc, à Venise, devant dix mille citoyens, la cause de la croisade, et demander les secours des flottes vénitiennes ; Constantinople tombait sous les Vénitiens avant de tomber sous Mahomet II ; leur vieux doge Dandolo montait à l’assaut à leur tête ; l’île de Crète (Candie), qui domine la route d’Égypte et de Syrie, était cédée aux Vénitiens pour leur part dans les dépouilles de l’empire d’Orient ; ils y ajoutèrent les territoires de Lacédémone, presque tout le Péloponnèse, et toutes les villes maritimes de la Thrace, de Thessalonique à Constantinople ; l’Istrie, la Dalmatie, les îles Ioniennes étaient dévolues à la république ; ses simples citoyens possédaient des principautés en Orient, tels que les duchés de Gallipoli et de Naxos, l’Archipel tout entier, alors devenu vénitien. […] Ce jeune prince, issu d’une branche indirecte de la maison de Savoie, avait été appelé à l’hérédité du trône par le vieux roi Victor-Emmanuel, sans enfants. Le frère du vieux roi, le duc de Génevois, sans enfants aussi, avait acquiescé à cette adoption. Ces deux vieux princes devaient attendre de leur jeune parent, associé au trône, une reconnaissance plus que filiale.
XIII Au milieu de la rue qui porte aujourd’hui le nom de rue Lamartine, nom qui s’inscrivit de lui-même le lendemain de la victoire de la République conservatrice, en juin 1848, sur les factions liberticides qui voulaient tuer à la fois l’ordre et la liberté, nom qui me fait penser toutes les fois que je passe, même dans ce quartier de petits trafics, au bon sens et au courage du vrai peuple de Paris, s’ouvre une petite rue annexe, montante, tortueuse, mal bâtie, mal pavée, et à laquelle on a laissé par oubli le vieux nom de rue Neuve-Coquenard. […] De distance en distance des portes d’allées, souvent solitaires et silencieuses, sur des cours tortueuses au fond desquelles on entrevoit de vieilles portes grillées comme des restes d’anciens couvents, de longues files d’enfants et d’habitants y entrent et en sortent muets, sous la garde sévère d’un homme en robe noire, pauvre troupeau qui se disperse de seuil en seuil, à mesure qu’il s’éloigne de l’école. […] Voyez mes bras nerveux, ils me servent de jambes, et s’appuyant en effet tout tremblant et tout chancelant sur le bois de son lit, de son lit sur le dossier d’un lourd fauteuil, du dossier du vieux meuble sur le marbre de la cheminée, et de la cheminée sur sa table, il arriva tout essoufflé sur un autre fauteuil, et s’attabla. […] À Paris, je dirai, car il faudra tout dire, Que les petits enfants ont pleuré ton martyre, Et, vieux, te pleureront longtemps.