Et la vie de cet homme ne fut pas moins belle que son œuvre. […] Quelle admirable vie, entièrement dédiée à la foi en l’idéal ! […] Il était l’idéalisateur de la vie. […] La cruelle vie hélas ! […] Puisqu’il n’aimait pas la vie.
C’était un homme heureux que le marquis d’Argenson dans les neuf ou dix dernières années de sa vie, après sa sortie du ministère. […] Dans ses plans de vie heureuse qu’il diversifie avec assez d’imagination, il faisait entrer plus de choses qu’il n’en tenait dans cette boîte ou petite cellule. […] Il s’est amusé à tracer divers plans de vie heureuse à son usage, avec des variantes. […] Avec cela les sens l’ont bien servi, et il a joui des plus grandes délices de la vie et de l’humanité. […] Il est vrai que c’est une folie, de là vient que les philosophes ne sont pas propres à la guerre, au lieu que les gens à passions y sont propres ; les jeunes gens, les sanguins, s’y dévouent légèrement et franchement, mais tout philosophe qui réfléchit mûrement trouve que le plus grand bien est de vivre, et le plus grand mal du monde est l’anéantissement ; car les gens à passions trouvent, disent-ils, la vie plus mêlée, de maux que de biens, au lieu que les philosophes trouvent le contraire et ont raison, la vie leur est délicieuse.