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416. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

non par vertu, mais par compassion. […] Nous ne le voudrions pas, ce monde idéal, sans la vertu et sans l’amour : et comment la vertu et l’amour seraient-ils sans le désir ni l’effort — et l’effort et le désir sans la douleur ? […] Mais la vertu ne serait plus la vertu dans un monde où la justice régnerait ainsi. […] Mais quelle vertu ? […] Une des vertus de M. 

417. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Si l’on essaye d’énumérer la quantité d’hommes honnêtes, recommandables par le talent, l’étude et des vertus de citoyen, que 89 avait fait sortir du niveau, qui avaient traversé avec honneur et courage les temps les plus difficiles, que la Terreur même n’avait pas brisés, que le Directoire avait trouvés intègres, modérés et prêts à tous les bons emplois ; si l’on examine la plupart de ces hommes tombant bientôt un à un, et capitulant, après plus ou moins de résistance, devant le despote, acceptant de lui des titres ridicules auxquels ils finissent par croire, et des dotations de toutes sortes qui n’étaient qu’une corruption fastueusement déguisée, on comprendra le côté que j’indique, et qui n’est que trop incontestable. […] Qu’on ait marqué d’abord, qu’on ait été puissant et glorieux à tout prix en son passage, et l’on n’aura en aucun temps été plus absous ; on vous trouvera, à défaut de vertu personnelle, une vertu plus haute, une utilité et moralité providentielle qui est l’ovation suprême aujourd’hui. […] Nous n’imaginons pas que personne mette en doute que partout et dans tous les temps il ne vive et ne meure loin de tout éclat une multitude d’hommes supérieurs à ceux qui jouent un rôle sur la scène du monde, etc. » Peut-être il n’a manqué à Mirabeau lui-même qu’un peu plus de vertu, de discipline, et un cœur moins relâché, pour rester et vivre inconnu ou du moins médiocrement connu, et simplement notable à la manière de ses pères. […] Lorsqu’on pousse trop loin l’idée de la prédestination des grands hommes, il arrive qu’on est amené, sans y prendre garde, à être sévère et injuste pour une foule d’hommes secondaires, mais estimables, qui dans leur temps et au nom de leur bon sens ou de leur vertu, et aussi de leurs passions, ont osé contredire sur quelque point et retarder un moment les triomphateurs. « A quarante ans, dit le poëte, il se déclare autour de Mirabeau, en France, une de ces formidables anarchies d’idées où se fondent les sociétés qui ont fait leur temps.

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