La faiblesse qui pèche est digne de compassion : l’orgueil qui attaque la vérité n’inspire aucun sentiment doux. » Le fils de saint Dominique se révèle ici avec une étrange menace de sévérité et de dureté qui, heureusement, s’est trompée de siècle. […] Les Païens eux-mêmes, tels que Platon, Plutarque, Cicéron et beaucoup d’autres, sont mille fois préférables à la plupart de nos écrivains modernes ; c’étaient des gens religieux, pénétrés de respect pour la tradition… Depuis trois ou quatre siècles, la littérature est dans un état de rébellion contre la vérité. » Ainsi voilà trois siècles littéraires rayés d’autorité, et, ce qui est plaisant, rayés au nom de la tradition même. […] c’est ce qu’il y a de plus fatal à la vérité ; et qu’il est difficile de n’y pas céder et succomber quand on y est porté par le courant même de sa nature d’artiste et par toutes les voiles du talent, quand il y a comme une harmonie préétablie entre les sujets qui nous tentent et nos cordes secrètes !
Ajoutons à cela, dans l’idée de beauté, un élément de subjectivisme et d’illusion par où elle alarme les croyants en une vérité morale objective et impérative. […] C’est pourquoi ces derniers ont toujours tenté de l’éliminer de l’art ou du moins de la subordonner à des idées étrangères : idée de vérité, idée du bien, idée d’utilité sociale et de sociabilité. C’est ainsi que pour les moralistes intellectualistes la beauté se définit par la part de vérité impersonnelle qu’elle enveloppe et qu’elle exprime.