Il y a eu deux Lauzun qui tous deux ont couru brillamment la même carrière, celle d’homme à la mode : le Lauzun du temps de Louis XIV et celui du règne de Louis XVI. […] J’ai touché, il y a quelque temps, l’autre Lauzun à propos de la Grande Mademoiselle qu’il avait su rendre folle de lui : il ne mérite pas un plus long regard. […] Quel assujettissement de caractère, au fond, et quel esclavage sous le faste de ces rois de la mode, qui en sont les premiers courtisans, et qui ont l’air de diriger les caprices de leur temps, quand ils en dépendent ! […] Voilà ce qu’offrent de plus saillant les prétendus Mémoires du duc de Lauzun, qui depuis quelque temps circulent manuscrits, et dont j’ai une copie entre les mains. […] De tout temps, des âmes passionnées ou mercenaires ont abusé des facilités que leur offraient des mémoires particuliers, inédits, pour répandre, sous le nom d’autrui, le venin dont elles étaient remplies.
Vers ce temps (1647), le roi tomba malade de la petite vérole ; sa mère en conçut les plus vives inquiétudes ; il lui en témoignait une tendre et touchante reconnaissance : Dans cette maladie, le roi parut à ceux qui l’approchaient un prince tout à fait porté à la douceur et à la bonté. […] Il n’était pas de ces esprits qui embrassent le renouvellement des temps, et sa politique finale n’a été que l’exagération de sa politique première, au milieu de circonstances générales qui incessamment se modifiaient. […] Il n’importe point dans quel temps, mais à quelles conditions une négociation se termine. […] Je crois trouver un merveilleux rapport entre cette manière de voir et de faire de Louis XIV, et celle des hommes distingués de son temps. […] Pellisson, qui fut un peu le Fontanes de ce temps-là, et que Louis XIV tira de la Bastille pour se l’attacher et pour en faire son rhéteur ordinaire, nous a transmis une Conversation, ou plutôt un discours qu’on recueillit au siège devant Lillep, le 23 août 1667, de la bouche même du roi.