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1291. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — II. (Fin.) » pp. 330-342

Jules César, le roi François et lui ont défait notre nation. » Cela me fit le suivre quelque temps pour apprendre de lui une partie de ce que j’en écris. […] D’Aubigné nous dit que Henri IV, dans le temps où il lui avait conseillé d’écrire cette Histoire, avait promis une somme raisonnable pour les voyages, pour la reconnaissance des lieux et des villes où s’étaient livrés les combats ; mais, les promesses étant demeurées sans effet, et après la mort de ce roi, ce fut à l’historien même à se pourvoir, à s’enquérir de toutes manières. […] Sa femme disait de lui, dans une lettre qui nous le peint le même jusqu’à la fin : La grande promptitude de Monsieur n’est point amoindrie avec l’âge, ni son excellent esprit, à qui il donne quelquefois plus de liberté que les affaires de ce temps ne permettent. Je lui dis souvent qu’il est temps d’arrêter sa plume ; ce sera du soulagement pour lui et pour ses amis. […] Les hommes de ce temps étaient beaucoup plus vigoureux et durs que ceux d’aujourd’hui, ce qui devait être parce que le sol qui les avait portés avait plus de dureté et de vigueur.

1292. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

D’autres fouillaient les antiques souvenirs, les ruines, les arceaux et les créneaux, et du haut de la colline, assis sur les débris du château gothique, ils voyaient la ville moderne s’étendre à leurs pieds comme une image encore propre à ces vieux temps, Comme le fer d’un preux dans la plaine oublié ! […] Mais au milieu de ces oublis trop naturels à la jeunesse de tous les temps, ils avaient une pensée, un culte, l’amour de l’art, la curiosité passionnée d’une expression vive, d’un tour neuf, d’une image choisie, d’une rime brillante ; ils voulaient à chacun de leurs cadres un clou d’or : enfants si vous le voulez, mais enfants des muses, et qui ne sacrifièrent jamais à la grâce vulgaire. […] Ayant eu l’honneur d’en faire partie à un certain moment et en des temps difficiles, je sais ce qui en est, et j’ai souvent réfléchi et à ce qui s’est fait et à ce qui aurait pu se faire. […] C’est le signe peut-être du sectaire, comme disait en ce temps-là M.  […] M. de Banville, dans cette pièce et ailleurs, n’hésite pas à nommer et à saluer, au rang de ses maîtres divins, un poète qui ne nous saurait être indifférent, le vieux Ronsard. « En ce temps-là, je ronsardisais », écrivait l’aimable Gérard de Nerval au début d’une de ses préfaces.

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