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471. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

En effet, M. de Lamartine, avec son talent idéal, avec son optimisme à la fois naturel et calculé, quand il serait propre à être historien, l’était-il à être l’historien de la Révolution française en particulier ? […] Or, la seule application d’un talent de cet ordre et de cette qualité à un tel sujet, à ces natures hideuses et à ces tableaux livides de la Révolution, était déjà une première cause d’illusion et de séduction insensible, un premier mensonge. […] Je laisse, on le voit, de côté le but politique, l’intention calculée peut-être, et je ne m’en prends qu’à ce qui est de la couleur littéraire presque inévitable et involontaire chez un talent du genre de celui de M. de Lamartine. […] J’aurais pourtant besoin que quelqu’un d’un talent moindre m’assurât que la ressemblance est réelle. Depuis que j’ai vu M. de Lamartine trouver de la beauté à toutes les femmes et du talent à tous les hommes de sa connaissance et en comparer quelques-uns à Horace ou à Phédon, j’ai besoin avec lui de garanties.

472. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — III. (Suite et fin.) » pp. 128-145

Si l’on voulait un jour donner idée du talent polémique de Carrel sur une échelle étendue, il faudrait réunir les cinq ou six grands articles qu’il a écrits dans cette discussion mémorable sur la pairie : c’est ce que j’appelle sa bataille rangée, la seule qu’il ait gagnée. […] Dans ces parties où le talent de Carrel se développe et se déploie, il garde le même caractère que j’ai déjà indiqué. […] Mais on peut croire que Chateaubriand eût moins loué Carrel écrivain, si celui-ci eût eu dans le talent quelque chose de cet éclat particulier qui, de loin, signalait aux yeux l’épée de Roland dès qu’elle apparaissait dans la mêlée. […] Mais que de talent et de qualités perdues dans des corridors obscurs ! […] Il y a eu là un travers qui a barré et finalement brisé sa forte vie ; qui a rendu inutile son noble caractère, et qui ne laisse aujourd’hui apparaître et survivre que son talent d’écrivain.

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