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207. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

C’était, comme nous le reconnaîtrons plus expressément par la suite (disait Fauriel), ce même idiome que j’ai distingué plus haut par la dénomination de latin rustique, et qui fut un peu plus tard nommé langue romane, ou roman ; il se divisait en nombreux dialectes, dont les deux plus tranchés, aux deux extrémités du pays, formèrent, l’un le français, ou roman du Nord ; l’autre, le provençal, ou roman du Midi20. » Tel est l’état général des choses au moment où notre étude proprement dite commence. […] Laissez-moi aujourd’hui, après vous avoir amenés au point où nous ayons à choisir entre les guides, vous parler de cette suite de travailleurs méritants, infatigables, qui n’ont cessé de se succéder, de se suppléer ou de se compléter depuis trente ans, et qui forment, à l’heure qu’il est, une vaillante phalange, composée et des praticiens de la vieille langue, qui y ont été rompus de bonne heure, sans avoir toutefois cm égal souci, un soin suffisant des langues savantes, et des plus distingués philologues, hellénistes ou latinistes classiques, non pas déserteurs de l’antiquité, maisralliés, bien qu’un peu tard, à la vieille étude nationale, et organisateurs d’emblée (grâce à leur procédé sévère, à leur méthode comparative) dans ces nouveaux champs d’exploration où, avant eux, il régnait bien de la confusion et du hasard. Je ne saurais prétendre sans doute à faire la part exacte des uns et des autres et à distribuer les rangs ; mais, par cela même que je caractériserai à peu près le rôle principal de chacun et le genre de service rendu, je vous aurai déjà donné bien des idées préalables et des aperçus du sujet que nous aurons à parcourir à leur suite dans les leçons prochaines. — Ce sera la seconde partie, le second point de cette première leçon. […] La comparaison des formes, les vues d’ensemble et de suite, l’idée de lois grammaticales nécessaires, le fil et la clef des étymologies précises, le sens naturel des permutations et altérations dans les mots, les analogies cachées, en un mot l’ organisation de leur sujet d’étude, ils ne s’en doutent pas. […] Que si, pour limiter la question au sujet qui surtout nous intéresse, on veut que les langues d’oc et d’oïl se soient fort rapprochées à l’origine et aient moins différé alors que dans la suite, ce n’a pu être qu’à la manière de deux sources qui, sortant d’un même marais (le latin corrompu), étaient naturellement plus voisines, au moment où elles en sortaient, que lorsqu’elleseurent parcouru un long chemin, chacune dans sa direction propre.

208. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre premier. Nature et réducteurs de l’image » pp. 75-128

Il est clair qu’à chaque coup la figure de l’échiquier tout entier, avec l’ordonnance des diverses pièces, leur est présente, comme dans un miroir intérieur, sans quoi ils ne pourraient prévoir les suites probables du coup qu’ils viennent de subir et du coup qu’ils vont commander. […] Toutes les fois que je jetais les yeux sur la chaise, je voyais l’homme. » Il est clair que, pendant plusieurs minutes de suite, il prenait la figure imaginaire pour une figure réelle. […] Plusieurs jours de suite, j’eus, soit dans mon lit, soit dans mon fauteuil, des hallucinations semblables ou des rêves véritables, dans lesquels je lisais des caractères orientaux. […] « Le 24 février 1791, dit-il, à la suite d’une vive altercation, j’aperçus tout d’un coup, à la distance de dix pas, une figure de mort… L’apparition dura huit minutes. […] À la suite d’un songe trop long pour être raconté, ma propre figure m’est apparue, assise dans un fauteuil, près d’une table, avec une robe de chambre blanche à raies noires ; elle s’est tournée vers moi, et l’effroi a été si grand que je me suis réveillé en sursaut.

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