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508. (1772) Éloge de Racine pp. -

Ils réveillaient des idées imposantes, ou des souvenirs chers et flatteurs, et parlaient à la fois à l’homme et au citoyen. […] Tous ces différens mérites étoient inconnus avant lui, et il y a joint des traits d’une éloquence frappante, et ces mots sublimes qui, s’échappant d’une ame fortement émue, ébranlent fortement la nôtre, lui donnent une plus grande idée d’elle-même, et y laissent un profond souvenir de l’homme rare à qui elle a dû cette puissante émotion. […] Enfin, si l’on considère que sa perfection peut être opposée à la perfection de Virgile, et si l’on se souvient qu’il parlait une langue moins flexible, moins poétique et moins harmonieuse, on croira volontiers que Racine est celui de tous les hommes à qui la nature avait donné le plus grand talent pour les vers. […] Loin de moi cet odieux dessein d’établir le triomphe d’un grand homme sur l’abaissement de son rival, ni de faire souvenir qu’il existe une autre Bérénice que celle de l’inimitable Racine. […] Et ne suffit-il pas qu’on se souvienne que pendant un moment Pradon parut triompher de Racine ?

509. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

La littérature française lui doit un souvenir, même quand ce souvenir serait fort tempéré de réserves et relevé de quelque sévérité. […] Vieux, il y revenait en souvenir et avec regret comme aux meilleurs instants de sa vie, « instants heureux, s’écrie-t-il, où, loin de s’occuper d’événements sinistres tels que ceux qui ont empoisonné la fin de notre carrière, on ne s’occupait que d’amours et de plaisirs !  […] Son nom pourtant restera toujours attaché au souvenir de la Révolution française, moins encore pour avoir été son adversaire à main armée et impuissant le jour de son début, que pour nous avoir raconté et dévoilé avec son insouciance trop nue et une trop insolente aisance la société gâtéeav, corrompue, railleuse et frivole qui, sous des dehors charmants, nourrissait tant de vices, et qui avait atteint et passé la mesure où les choses humaines veulent être renouvelées.

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