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700. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

La triste connaissance du cœur humain fait, dans le monde, de l’exercice de la bonté un plaisir plus vif ; on se sent plus nécessaire, en se voyant si peu de rivaux ; et cette pensée anime à l’accomplissement d’une vertu à laquelle le malheur et le crime offrent tant de maux à réparer. […] Toutes les passions, certainement, n’éloignent pas de la bonté ; il en est une surtout qui dispose le cœur à la pitié pour l’infortune ; mais ce n’est pas au milieu des orages qu’elle excite, que l’âme peut développer et sentir l’influence des vertus bienfaisantes. Le bonheur qui naît des passions est une distraction trop forte, le malheur qu’elles produisent cause un désespoir trop sombre pour qu’il reste à l’homme qu’elles agitent aucune faculté libre ; les peines des autres peuvent aisément émouvoir un cœur déjà ébranlé par sa situation personnelle, mais la passion n’a de suite que dans son idée ; les jouissances, que quelques actes de bienfaisance pourraient procurer, sont à peine senties par le cœur passionné qui les accomplit.

701. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre II. La langue française au xvie siècle »

Les premiers humanistes qui essayèrent, dans des traductions ou autrement, d’appliquer la langue vulgaire à de hautes pensées, se sentirent fort embarrassés. […] Ils en aimaient donc la pureté, ils en respectaient la propriété : mais ils le sentaient pauvre et maigre, et où il défaillait, ils tâchaient de le refaire et compléter. […] On sent bien que la langue s’est réglée plutôt par une sorte de lassitude générale que par une intime solidité d’organisation qu’elle reste livrée à tous les hasards de la fantaisie individuelle de toutes parts on aspire à l’ordre, à la stabilité, à l’unité.

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