À la vérité, l’école qui s’intitule naturaliste paraît avoir une grande prédilection pour la forme du roman. […] Au théâtre, le poète, présent mais silencieux, n’y peut plus animer la nature et lui insuffler, comme dans le roman, une sorte de force passionnelle active.
C’est alors, du reste, qu’on voit se prononcer les traits de cette philosophie qu’on peut dire française, et à côté de laquelle toute autre semble plus ou moins exotique, la philosophie du sens commun : en spéculation celle des apparences, en pratique celle du juste milieu, combinée avec le scepticisme quant aux choses invisibles ; philosophie qui, déjà perceptible dans le Roman de la Rose, se retrouve tout entière, et dans son plein développement, dans les écrits de Voltaire3. […] Madame de Sévigné appuie par-dessus tout sur la tendresse de cœur de La Rochefoucauld pour sa famille et ses amis : « M. de La Rochefoucauld a perdu sa mère ; je l’en ai vu pleurer avec une tendresse qui me le faisait adorer ; c’était une femme d’un extrême mérite ; et enfin, dit-il, c’était la seule qui n’ait jamais cessé de m’aimer… Le cœur de M. de La Rochefoucauld pour sa famille est une chose incomparable ; il prétend que c’est une des chaînes qui nous attachent l’un à l’autre176. » Ailleurs elle le voit pleurer au récit d’une action généreuse ; plus loin elle se console d’avoir été dupe d’une plaisanterie en ajoutant : « Si je voulais, je vous citerais M. de La Rochefoucauld, qui était aussi aisé à tromper que moi ; mais il avait tant d’autres sortes de mérites, que je n’en puis pas faire une consolation, ni une comparaison177. » En parlant de son goût pour les romans de la Calprenède et les grands coups d’épée, Madame de Sévigné ajoute : « Si je n’avais M. de La Rochefoucauld pour ne consoler, je me pendrais de trouver encore en moi cette faiblesse178. » À ces témoignages, on en pourrait joindre une foule d’autres répandus dans les lettres de l’aimable amie de La Rochefoucauld.