N'est-il pas aisé de s'appercevoir qu'il a employé le merveilleux partout où il a pu, qu'il l'a même outré d'une maniere ridicule ? […] Helvétius, il a attendu le moment de sa mort, pour le mépriser & le rendre ridicule. […] Qu'on rapproche ce qu'il dit dans de certaines occasions, de ce qu'il débite dans d'autres ; qu'on rapproche ses sentimens d'humanité, du mépris qu'il témoigne pour l'humanité en général ; ses déclamations contre les vices, des peintures séduisantes qu'il en fait ; son enthousiasme pour les vertus, du ridicule qu'il leur donne ; ses élans affectueux pour la tolérance, de ses rigueurs impitoyables contre les abus : & on sera à portée de juger, que s'il a été quelquefois réellement pénétré des belles maximes qu'il énonce, il ne l'a pas moins été des maximes qui leur sont contraires, puisque celles-ci paroissent aussi senties, aussi vives, & qu'elles sont aussi fortement énoncées & plus souvent répétées que les autres. […] Tel est cependant l'Homme, dont la plus grande partie de la Nation a fait son Idole, & qu'on a encensé, sur ses derniers jours, au point de ne pas craindre de le rendre ridicule, en le couronnant & lui décernant sur un Théatre public, les honneurs de l'Apothéose ; tel est cependant l'Homme qu'on a préconisé, célébré, honoré avec enthousiasme, & à qui on s'est proposé très-sérieusement d'élever des statues, sans songer que dans l'Antiquité, & chez tous les Peuples sages, cet honneur n'a jamais été que le prix des vertus héroïques, ou des services rendus à la Patrie.
» Et les autres, qui ne sont pas l’éléphant, ne se sentent point ridicules non plus. Chacun trouve ridicules les autres et dit, par exemple, de l’éléphant qu’il faudrait ajouter à sa queue, ôter à ses oreilles, mais, chacun pour soi-même, ils se trouvent tous très bien. […] Il est le fils de la jument et de l’âne, et il parle toujours, faisant sa généalogie, comme dit La Fontaine, de sa mère, la jument, avec une impertinence, et un orgueil, et une fatuité ridicules. […] Il a crié à son siècle : Vous me direz ce que vous voudrez, les animaux ne sont peut-être ni aussi bons, ni aussi ridicules que je les ai peints — je le regrette peut-être — et en bien et en mal ; mais pour ce qui est d’être extrêmement intelligents, voilà ce que je soutiens absolument contre Descartes et contre les cartésiens.