Bernardin de Saint-Pierre s’ennuya fort à l’Île-de-France tant qu’il y vécut, mais revenu de là, et de loin, il ne considéra plus que la beauté des sites, la douceur et la paix des vallons ; il y plaça des êtres de son choix, il fit Paul et Virginie. […] On en est revenu. […] Quand ils partaient l’un et l’autre dans leur boc pour la fête, ils n’étaient que très différents : quand ils en sont revenus, un abîme les sépare.
Combes, repasser sur les différentes phases de la carrière politique de Mme des Ursins pendant ses treize années d’influence ou de domination en Espagne : il a très bien distingué les temps, démêlé les intrigues selon l’esprit de chaque moment, montré Mme des Ursins représentant dès l’abord le parti français, mais le parti français modéré qui tendait à la fusion avec l’Espagne, et combattant le parti ultra-français représenté par les d’Estrées : — ce fut sa première époque : — puis, après un court intervalle de disgrâce et un rappel en France, revenue triomphante et autorisée par Louis XIV, elle dut pourtant, malgré ses premiers ménagements pour l’esprit espagnol, s’appliquer à briser l’opposition des grands et travailler à niveler l’Espagne dans un sens tout monarchique, antiféodal ; c’était encore pratiquer la politique française, le système d’unité dans le gouvernement, et le transporter au-delà des Pyrénées : — ce fut la seconde partie de sa tâche. — Mais quand Louis XIV, effrayé et découragé par les premiers désastres de cette funeste guerre de la succession, paraît disposé à abandonner l’Espagne et à lâcher son petit-fils, Mme des Ursins, dévouée avant tout aux intérêts de Philippe V et du royaume qu’elle a épousé, devient tout Espagnole pour le salut et l’intégrité de la couronne, rompt au-dedans avec le parti français, conjure au dehors la défection de Versailles, écrit à Mme de Maintenon des lettres à feu et à sang, s’appuie en attendant sur la nation, et, s’aidant d’une noble reine, jette résolument le roi dans les bras de ses sujets. […] Une fois la chose jetée en avant, elle ne laisse guère passer de courrier sans y revenir, sans y ajouter, n’omettant rien pour la rendre et la montrer possible et même facile. […] [NdA] Expression du marquis de Lassay (Recueil de différentes choses, Lausanne, 1756, tome i, page 264). — Antérieurement, soit à Paris, soit à Rome, Mme des Ursins avait beaucoup vu le cardinal de Retz et avait pu prendre de lui ses premières leçons de politique ; il ne tiendrait même qu’à nous de croire qu’elle fut sa dernière galanterie : « On me mande, écrivait Bussy à Mme de Montmorency, que M. le cardinal de Retz achève de faire sa pénitence chez Mme de Bracciano qui, comme vous savez, était Mme de Chalais ; cela étant, je ne désespère pas de voir l’abbé de La Trappe revenir soupirer pour quelque dame de la Cour ; et si l’on va en paradis par le chemin que tient ce cardinal, l’abbé est bien sot de tenir le chemin qu’il tient pour y aller. » 57.