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772. (1899) Esthétique de la langue française « La métaphore  »

Il est possible que le fire-dog des Anglais vienne de France ; le bouc des pays germaniques représentait peut-être une des figures du diable. […] Pour l’homme de tous les temps et de tous les climats, compter et conter représentent une seule et même opération ; un mot les traduit tous les deux : énumérer. […] Séparé de l’idée qu’il représente, dessein n’est plus qu’une de ces abstractions verbales à moitié mortes dès le jour qu’elles sont nées et destinées à disparaître bien avant la langue dont elles ont fait partie.

773. (1913) La Fontaine « II. Son caractère. »

Le ton dont il parle, quand il se croit ou quand il se représente comme inspiré par les passions de l’amour, est beaucoup moins fort, beaucoup moins passionné. […] Je me représente La Fontaine de la façon suivante : cette fois, La Fontaine a été amoureux (le texte l’indique), parce qu’il n’était amoureux d’aucune femme ; évidemment, c’est la rêverie sur l’amour lui-même, c’est la rêverie sur la jeunesse amoureuse, c’est la rêverie sur des souvenirs lointains et chéris, comme je le disais tout à l’heure, et qui, précisément, parce qu’elle n’a pas d’objet précis  si elle en avait un, elle deviendrait un peu nonchalante comme nous voyons qu’était La Fontaine  et qui, parce qu’elle n’a pas d’objet précis, a quelque chose de vague, d’indéfini, de lointain, de mystérieux… je mets beaucoup de synonymes au mot poétique, et celui-ci aurait suffi. […] Il lui a fait faire des sottises, comme par exemple dans l’Ane et le petit Chien, mais il l’a toujours représenté comme un bon animal sacrifié, maltraité, opprimé, et il a exercé sur lui sa pitié.

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