Parce qu’il faut un sentiment plus fin pour saisir le caractère de l’art de Boileau, est-ce une raison pour nier qu’il soit poète ? […] S’est-on assez moqué de cette pauvre satire II, avec son légendaire combat de la rime et de la raison ? Mais a-t-on réfléchi que l’accord de la rime et de la raison, c’est tout simplement l’invention d’une forme qui réalise en perfection l’idée, et que la rime raisonnable, c’est en fin de compte la rime expressive ? […] L’Épître sur l’Amour de Dieu est un beau morceau de raison philosophique et de théologie parfois éloquente, où il n’y a pas un grain de poésie religieuse. […] Seulement ce n’est pas une raison pour la nier, quand par hasard elle se dégage et trouve sa forme : et surtout ce qu’elle a d’étroit et de court n’en doit pas faire méconnaître la rareté originale.
Marguerite ne veut ni se tromper, ni tromper son lecteur ; ses impressions ne sont jamais plus fortes que sa raison. […] Marot y vit avec raison une menace contre sa personne, et il alla achever sa traduction à Genève. […] L’esprit n’est pas une faculté distincte comme la sensibilité, l’imagination et la raison, auxquelles correspondent des modes différents de notre pensée, qui forment comme le domaine séparé de chacune. Mais ne serait-ce point le don de sentir, d’imaginer et d’exprimer dans une mesure moindre que le génie, et dans un ordre de pensées qui ne demande ni la sensibilité la plus profonde, ni la plus grande vivacité de l’imagination, ni la raison la plus relevée ? […] C’est cet esprit, formé d’une sensibilité plus douce que profonde, d’une imagination plus enjouée que forte, d’une raison sûre, quoique bornée, qui fait vivre les poésies de Marot.