Il s’agit de savoir quel rôle y jouent les grands hommes et quelle place doit leur être accordée. […] S’il est vrai que chaque époque se forge de la sorte des dieux mortels à son image et maltraite ou ignore des hommes de valeur réservés à l’admiration des générations suivantes, il est nécessaire de réduire le rôle excessif attribué trop fréquemment à ces fortes individualités qui dominent du haut de leur gloire le siècle où elles ont vécu.
Revenant donc de l’état-major autrichien avec sa réponse mortifiante, il ne put s’empêcher de dire à Alexandre : « Je suis vraiment peiné, Sire, du rôle qu’on fait jouer à Votre Majesté. » Le mot était vif et toucha l’épiderme. […] Cependant il avait rédigé une notice à l’adresse de l’empereur Alexandre pour démontrer l’urgence de faire changer de rôle à l’armée de Silésie commandée par Blucher, qu’il aurait voulu voir rappeler vers Dresde. […] Le voyage de Jomini à Prague au-devant de sa famille ne l’empêcha point de rejoindre à temps l’empereur de Russie avant les journées de Leipsick, son rôle de donneur de conseils fut ce qu’on a vu déjà : il était une Cassandre prophétique, qui parlait pour l’acquit de sa conscience et qu’on n’écoutait qu’à demi. […] Olivier, en plus d’une page de ses Études d’histoire nationale, Monnard même dont je viens de parler dans l’Histoire (continuée) de la Confédération suisse 58, ont parfaitement défini son rôle. […] Le maréchal Ney était le type de ce que l’on pouvait désirer de plus parfait en ce genre. » C’est qu’en effet, dans ce rôle de général d’arrière-garde, on ne perd pas de vue l’ennemi un seul instant.