Un Warwick, moins ambitieux et moins agité, non faiseur de rois, mais protecteur fidèle d’un seul roi, se faisant écouter et sachant écouter lui-même, grand ministre régulier d’une monarchie régulière, c’est un peu son rêve de derrière la tête. […] L’Empire romain a existé, qu’oublie Commynes, tant le souvenir au commencement du xvie siècle en est loin, et au fond du rêve de tous les conquérants, de tous ceux qui veulent rompre démesurément l’équilibre par division que contemple Commynes, il y a, ou du moins on peut leur faire l’honneur de le croire, un désir d’établir le véritable équilibre, qui est l’équilibre par l’unité. […] C’est l’esprit positiviste qui la domine, le goût des faits, le goût (ce qui est comme un signe précurseur très longtemps à l’avance) des masses de faits, d’abord parce que les faits ne commencent en effet à prouver ou à faire prévoir quelque chose que quand ils sont en masse, ensuite parce que l’homme d’esprit positif aime comme à remplir de l’amas des notions exactes les places que le surnaturel ou le rêve pourrait occuper dans son cerveau, ou comme à dresser le monceau des faits précis en rempart compact entre le surnaturel et lui. […] Quand on veut se marier, il faut la quitter. — C’est le rêve d’un moine intelligent et instruit ? […] L’office des évêques et des curés est de veiller sur cela ; mais en l’autorité où Dieu vous a mis, la principale charge en revient sur vous, voire de mettre les autres en train afin que chacun s’acquitte de son devoir. » Le monde entier soumis à des gouvernements théocratiques, l’homme par tout pays régi et surveillé de près en ses mœurs, en sa conduite privée, en ses propos, en sa tenue et en son maintien, le grand couvent universel sur le modèle du couvent genevois, voilà le grand rêve, dépassant toutes les puissances humaines, et presque l’imagination, que le rude réformateur poursuit à travers toute l’Europe, et essaye de commencer à réaliser, en prodiguant ses conseils, ses exhortations, son temps et ses forces.
Or le public rêve, bâtit des châteaux en Espagne, philosophe sur la nature des choses et la destinée, cause des pièces qu’il a vues et des livres qu’il a lus. […] — Cette « humanité » au moins morale, ce « pananthropisme », un peu plus large, il faut l’avouer, que tous les panslavismes, pangermanismes et panlatinismes, cette cosmopolis religieuse, a naturellement été le rêve de tous les grands hommes d’action et de charité, chez qui l’esprit d’action et de charité l’emportait sur l’esprit d’autonomie et d’indépendance ; c’est dans ce rêve que se rencontraient déjà, ou qu’essayaient de se rencontrer Bossuet et Leibniz pour la grande affaire de la « Réunion ». […] Chaque galerie a son rêve de pierre tout particulier, tout spécial, très différent de celui d’à côté. […] C’est comme un rêve malsain de la nature, rêvé à nouveau par un esprit humain doué de l’extrême sensibilité et de l’éternelle inquiétude. […] Les personnages y semblent des êtres de rêve qui s’expriment par paroles sibyllines, sur une scène de nuages, dans un décor de crépuscule.