Tout ce que j’en dis est si pâle qu’il vaut mieux en venir à nos réalités connues. — La dernière lettre en trio chantait tout ce que je demande à Dieu : l’espoir et l’harmonie ! […] C’est ce qui ressort avec énergie de ce passage, qui rend l’amère et dernière réalité dans ses traits les plus cuisants : « (À Mme Duchambge, le 27 décembre 1855)… J’ai revu ton Breton ferré qui est venu s’asseoir cordialement avec nous, il ne sentait plus la lavande. […] L’aspect nu de la réalité, tout ce qu’elle a d’inexorable et de fatal, revient assaillir, bon gré mal gré, ces âmes aimantes qui veulent espérer, et les envahit, les remplit de douleurs profondes.
La réalité des choses, à chaque moment, me fait l’effet d’une grande mer plus ou moins agitée ; les événements qui surgissent et aboutissent sont les vagues dont se compose la surface mobile ; mais, sous ces vagues apparentes, combien d’autres mouvements plus profonds, plus essentiels, bien qu’avortés et sourds, de qui les derniers dépendent, et que pourtant il n’est donné à nul œil de sonder ! […] Si l’histoire prétendait reproduire exactement la réalité même, elle devrait viser à être le miroir de cet océan mobile, de cette surface perpétuellement renouvelée, ce qui devient impossible. […] C’est un mélange singulier des fleurs idéales de l’imagination et des hideuses réalités de la vie servile.