Sabbatier voit partout les doctrinaires comme d’autres les jésuites), marchant constamment à son but de brouiller toutes les idées pour dénaturer tous les sentiments nationaux, tous les principes patriotiques, avait travaillé dix ans à faire une renommée colossale à un romancier anglais mille fois inférieur à Richardson, à Fielding, à Goldsmith, mais bien digne de sa tendresse puisque à sa qualité d’étranger il joignait le titre encore plus sacré de pamphlétaire aux ordres de l’aristocratie bretonne pour déchirer la France et tout ce qui faisait sa gloire et sa prospérité. » Ce sont là de ces douceurs judicieuses que le biographe de Victorin Fabre répand comme le lait et le miel sur la tombe de son héros. […] Certes il n’était pas besoin d’entrer dans de telles particularités enfantines pour établir, ce qui est très-vrai, que Victorin Fabre, imbu des principes de 89, y resta constamment fidèle, et fut jusqu’à son dernier jour un patriote de ce temps-là ; pas plus qu’il n’était besoin, je pense, pour établir l’excellence de ses premières études, d’enregistrer ce propos mémorable d’un de ses maîtres : Enfin je ne lui connais d’autre défaut que celui de ronger ses ongles ! […] Victorin Fabre a laissé un ouvrage inachevé sur les Principes de la société civile ; il en lut à l’Athénée, en 1822, des fragments qui (j’en fus témoin) ne réussirent que très-médiocrement : « Cet ouvrage, s’écrie l’éditeur, est peut-être le plus vaste, le plus gigantesque qui ait jamais été entrepris… Tel qu’il est, il me paraît encore le plus grand monument élevé à la science politique. » Ce sont de telles exagérations enthousiastes qui, jointes aux violences dénigrantes, nous ont donné le courage de dire hautement toute notre pensée sur Victorin Fabre, et d’insister sur le phénomène singulier de son avortement laborieux.
Ils se réduisent à l’intelligence, comme si l’homme n’était que cela ; ils appellent conscience le sentiment que le principe intelligent a de lui-même, comme si c’était là tout le sentiment dans l’homme ; les phénomènes qui se passent hors de la portée de la conscience ainsi définie sont déclarés extérieurs au moi véritable, étrangers à l’homme réel. « Le principe intelligent (le moi, l’homme), disent-ils, ne peut avoir conscience de la contraction musculaire, de la digestion, de la circulation du sang, parce que c’est le muscle qui se contracte, l’estomac qui digère, le sang qui circule et non pas lui. […] Mais la conscience des psychologistes, c’est-à-dire le sentiment que le principe intelligent a de lui-même, n’est qu’un cas particulier, une manifestation concentrée et restreinte de la sensibilité générale et de la vie.