« Madame Récamier était émue, ébranlée ; elle accueillit un moment la proposition d’un mariage, preuve insigne, non-seulement de la passion, mais de l’estime d’un prince de maison royale fortement pénétré des prérogatives et de l’élévation de son rang. […] Quatre ans s’écoulèrent ; les obstacles à ce divorce, les résistances du roi de Prusse à un mariage disproportionné pour son cousin, la guerre, l’éloignement ne parurent point affaiblir la passion du prince. Madame Récamier reprit son sang-froid un moment troublé ; elle écrivit au prince pour retirer la parole écrite qu’elle lui avait donnée d’être à lui. […] Le prince quitta Schaffhouse après y avoir vainement attendu son amie. […] Le prince commanda à Gérard un portrait de celle dont il ne pouvait aimer que le souvenir et emporter que l’image en Prusse.
On a calculé que les apanages des princes de la famille royale, comtes d’Artois et de Provence, ducs d’Orléans et de Penthièvre, couvraient alors le septième du territoire28. Les princes du sang ont ensemble un revenu de 24 à 25 millions ; le duc d’Orléans, à lui seul, possède 11 500 000 livres de rente29. — Ce sont là des vestiges du régime féodal ; on en trouve aujourd’hui de semblables en Angleterre, en Autriche, en Prusse, en Russie ; en effet la propriété survit longtemps aux circonstances qui la fondent. […] On a vérifié que les princes du sang, pour leurs deux vingtièmes, payaient 188 000 livres, au lieu de 2 400 000 Au fond, dans ce régime, l’exemption d’impôt est un dernier lambeau de souveraineté ou tout au moins d’indépendance. […] Dans ces domaines qui comprennent plus de douze de nos départements, les princes du sang nomment aux offices de judicature et aux bénéfices. […] Ce prince fait cesser cet abus et obtient de rentrer dans une somme de 5 344 livres qu’on lui avait fait payer indûment de ce chef. » 33.