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1452. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

On peut employer deux méthodes de démonstration : partir des faits particuliers, en accumuler un grand nombre et voir à quelle vérité générale ils aboutissent ; ou bien supposer établie cette vérité, la prendre elle-même pour point de départ et voir si elle conduit, par voie de conséquences, à des faits prévus qui la confirment. […] Mais où se montre de la façon la plus éclatante et la plus singulière la prédominance tyrannique de la conception réaliste chère à toute cette époque, c’est peut-être dans le caractère que prend alors le socialisme. […] Tant que le mariage est proclamé indissoluble, le désaccord du mari et de la femme mène à une situation insoluble, par conséquent triste et tragique, si les caractères en présence sont sérieux et passionnés ; bouffonne au contraire et propice au vaudeville, si les caractères mis aux prises sont tièdes et vulgaires. […] L’adultère devient sous leur plume quelque chose de poétique ou tout au moins de sympathique  ; car il a l’excuse d’une quasi-nécessité en certains cas de tyrannie masculine et d’impossible union ; il prend une certaine grandeur par le danger bravé ; il émeut par le malheur presque inévitable où il mène. […] Il semble que l’on s’achemine doucement vers cette conclusion : le livre est justiciable de la conscience des lecteurs ; il ne relève de la loi qu’en des cas très exceptionnels, par exemple quand il prend le caractère d’une tentative avérée de corruption sur des mineurs.

1453. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

C’est là que des théories destinées à troubler et à renouveler la société essaient leurs ailes avant de prendre leur vol.  […] L’esprit, sous les mille formes qu’il peut prendre, y miroite et chatoie. […] C’est là que pourrait bien avoir pris naissance un art encore très français, celui de séculariser la philosophie et de populariser la science, j’entends le talent de mettre à la portée des intelligences à demi cultivées les mystères réservés d’abord aux initiés. […] Le débat de Clitandre et de Trissotin, dans les Femmes Savantes, nous permet de prendre sur le fait la lutte de ce qui était alors l’esprit nouveau contre la tradition mourante du xvie  siècle : Permettez-moi, monsieur Trissotin, de vous dire, Avec tout le respect que votre nom m’inspire, Que vous feriez fort bien, vos confrères et vous, De parler de la cour d’un ton un peu plus doux ; Qu’à le bien prendre, au fond, elle n’est pas si bête Que, vous autres, messieurs, vous vous mettez en tête ; Qu’elle a du sens commun pour se connaître à tout ; Que chez elle on sa peut former quelque bon goût, Et que l’esprit du monde y vaut, sans flatterie, Tout le savoir obscur de la pédanterie. […] Il risque d’efféminer et d’amollir ceux qui le prennent pour guide.

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