Elle peut s’éclipser un moment, mais c’est pour reparaître au premier instant de calme. […] La condition première d’une telle action est de revenir souvent à la charge, d’user de sa plume comme de quelque chose de vif, de fréquent, de court, de se tenir en rapport continuel avec le public, de le consulter, de l’écouter parfois, pour se faire ensuite écouter de lui.
Il se dédommagea de cette inaction forcée par quelques-uns de ses premiers et de ses plus beaux poèmes, et cette vue des Pyrénées hâta peut-être aussi l’idée du roman de Cinq-Mars. Le début d’Alfred de Vigny en littérature date de 1822 ; son premier recueil poétique parut sans nom d’auteur70. […] On ne les guérit qu’en les portant. » Si on le portait en effet, c’est-à-dire si on l’écoutait, si on consentait à ne rien perdre de ses paroles, si l’on perçait par-delà cette couche première et comme ce premier enduit d’un amour-propre à la fois satisfait et souffrant, on retrouvait l’amabilité, la distinction poétique infinie, les images, les comparaisons ingénieuses et méditées. […] Or M. de Vigny, ayant réfléchi à quelques-unes des objections qu’on lui avait faites devant la Commission sur certains faits graves imputés par lui au premier Empire, avait, tout bien considéré, supprimé au dernier moment une des phrases qu’il devait lire ; il n’en avait point fait part à M. […] — Et c’est alors qu’il offre à la belle et pâle voyageuse, comme aux premiers jours du monde, la hutte roulante du berger.