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679. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Auguste Barbier »

Publiée en 1830, sa première pièce fut cette fameuse Curée, qui, sans préparation, sans grondement antérieur, tomba, comme la foudre, dans la publicité, et y embrasa tous les esprits, y alluma toutes les curiosités… Depuis, je crois, le grand Corneille, personne n’avait donné un pareil tressaillement d’admiration aux entrailles de tout un pays. […] André n’était que l’éphèbe de cette poésie ; Auguste Barbier devait en être l’homme, dans sa toute-puissante virilité… Quand il lança, de ce bras musclé qui rappelle les bras de Michel-Ange, ces premiers vers-flèches à la tête de la Révolution de 1830, ce que l’imagination avait rêvé sur ces grands noms : Archiloque et Tyrtée, dont on n’avait point les vers, fut réalisé pour elle ! […] Les Silves sont non seulement un recueil de vers médiocres, mal faits et souvent d’une platitude suprême, mais de plus ce fut un affreux désastre pour le poète, atteint par cette publication jusque dans le passé de son génie, Ce qui avait, en effet, marqué le génie d’Auguste Barbier de ce grand et exceptionnel caractère sur lequel j’ai tant insisté, ce fut son éruption sans fumée, l’élancement si subitement pyramidal de la flamme du volcan vers le ciel ; ce fut, enfin, ce premier coup d’archet, sans prélude, sans agacement préalable d’aucune corde, qu’on appelle La Curée, et qui ne pouvait s’élever d’une note de plus sans faire voler l’instrument en éclats ! […] On verra si, à l’exception de la pièce intitulée la Tentation, qui, du reste, avait paru dans une des premières éditions des Iambes, et qui, antérieure aux Iambes, promettait déjà les vers magnifiques du Pianto : Dors, oh !

680. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Ch. Bataille et M. E. Rasetti » pp. 281-294

Charles Bataille et qui leur donnent cette ressemblance à laquelle tout le monde, au premier abord, a été pris. […] Vous savez que pour être mis en première ligne dans les romans des réalistes, il faut être vulgaire de nom et faire des choses vulgaires ; c’est la suprême caractéristique de ces égalitaires charmants. […] corrompue peut-être, mais intelligentielle ; c’est de la combinaison, détestable, il est vrai, mais spirituelle et volontaire, et ce forcené de chair et de sang qui s’appelle Bataille et qui ne conçoit que comme une bataille la volupté, ne se donne pas la peine d’en chercher si long… Premier bond de dégoût pour le cœur et l’esprit, quand on lit ce livre ; premier bond suivi de bien d’autres, quand on s’obstine à cette lecture, et on s’y obstine ; la violence du talent vous tient… Pas de séduction !

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