La république se présentait sans doute à mon esprit, mais elle s’y présentait comme une possibilité improbable plutôt que comme un but arrêté ou même désirable encore ; seulement je voulais, dans le cas où la nation se réfugierait, après le renversement du trône d’Orléans, dans la république, qu’une histoire consciencieusement sévère de la première république eût prémuni le peuple français contre les mauvaises passions, les illusions, les fanatismes, les crimes et les terreurs qui avaient perverti, férocisé et ruiné la première fois le règne du peuple. […] Je trouvai dans madame Lebas une femme de la Bible après la dispersion des tribus à Babylone, retirée du commerce des vivants dans le haut étage d’un appartement modique, conversant avec ses souvenirs, entourée des portraits de sa famille décimée au 18 fructidor, de ses sœurs dont Robespierre avait dû épouser la plus belle, de Robespierre lui-même dans tous ces costumes élégants dont il s’enorgueillissait de présenter le contraste sur sa personne avec la veste, le bonnet rouge, les sabots, signes sordides, flatteries ignobles des Jacobins à l’égalité et à la misère des populaces. […] Je lui répétai ce que lui avait dit à ce sujet Béranger : « Je ne me présente point à vous, lui dis-je, comme un partisan de la terreur et comme un réhabilitateur de la mémoire que vous cultivez. […] Elle m’accorda un libre accès dans sa retraite et me laissa feuilleter à mon aise, et page par page, sa mémoire présente, intarissable et passionnée sur tous les détails intérieurs ou extérieurs de la vie privée et de la vie publique de Robespierre.
IV C’est ainsi que j’ai raisonné, c’est ainsi que j’ai essayé d’écrire, c’est ainsi que j’ai été amené à faire beaucoup de portraits et à placer ces figures avant l’action, comme sur la scène on présente l’acteur avant le rôle, et non pas le rôle avant l’acteur, contresens à la logique de la nature dont Plutarque a donné l’exemple aux pédants de l’histoire. […] Elle était sœur de ces enfants que l’impératrice tenait par la main quand elle se présenta en suppliante devant les fidèles Hongrois, et que ces troupes s’écrièrent : “Mourons pour notre roi Marie-Thérèse ! […] Mais, l’histoire étant à mes yeux toujours un peu monumentale, toutes les fois qu’il se présente à ma plume de ces mots signifiant la même chose, je choisis de préférence le mot le plus classique, le mot à étymologie latine. […] Son journal, l’Ami du peuple, suait le sang à chaque ligne. » XVI L’accusation d’avoir présenté le parti tour à tour ambitieux et faible des Girondins pour un parti idéal de la Révolution n’est pas moins erronée. […] Mirabeau, La Fayette, Robespierre lui-même, effacèrent la guerre du symbole qu’ils présentaient à la nation.