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500. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Charles De Rémusat »

Ce serait trop français pour Rémusat, devenu Anglais à force de regarder l’Angleterre, pour Rémusat qui a le spleen politique et la nostalgie du régime parlementaire dont il est privé ! […] Au lieu d’écrire simplement de Bolingbroke, de Walpole, de Junius, de Burke et de Fox, Rémusat a écrit des dissertations sur les principes constitutionnels, sur l’aristocratie, sur la religion, sur toutes ces choses, enfin, qui sont le pont aux ânes de tous les dissertateurs politiques, pont qu’un tour de roue de siècle fait crouler et sur lequel, d’ailleurs, Rémusat ne s’avance pas avec une de ces magnifiques allures qui, pour l’âne, font oublier le pont… Rien de plus médiocre que cette partie de son travail. […] Ce côté-là n’est pas le préféré par Rémusat, qui réserve, dit-il, en toutes choses, comme il convient, les droits de l’esprit humain, qui croit à l’efficacité des traités philosophiques de politique libérale, et qui ne veut pas faire à une nation qui pense l’affront de la croire gouvernée par le hasard ou l’habitude (pages 26 et 27 du premier volume). […] Trop fin pour être fort, cet homme de bonne compagnie, ce lettré pâle et blond, a finassé avec l’expression de ses haines ou de ses ressentiments politiques, et il a raté le pamphlet, — le pamphlet, qui n’est ni une affaire de réticence ni un zézaiement de salon ou d’académie !

501. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Milton »

Quand il arrivera à l’examen du Paradis perdu, il ne mettra pas, bon gré mal gré et de force, et en faussant tout autour de soi pour l’expliquer, toute l’Angleterre politique et sociale du temps de Milton dans ce poème, qui n’eut d’autre source que la Bible, entrée dans la tête d’un grand poète. […] … Cet homme d’affaires et d’enseignement, qui aimait également sa république et son école, qui faisait de la diplomatie, de la politique et de la discussion théologique toute la journée en latin, trouvait cela bon et savoureux. […] et inflexible Tête-Ronde dont le temps a fait une tête de mort comme des autres, dans le charnier de l’Histoire où elle aurait été oubliée, si elle n’avait été qu’une tête politique et religieuse, et que l’historien, qui n’est, en somme, qu’un fossoyeur, n’aurait peut-être pas reconnue en la roulant sous sa bêche ? […] À côté des pédants de la Critique, il y a les pédants de la Politique, — une race nouvelle, — il y a les caporaux de la Démocratie, qui donnent, depuis quelque temps, le mot d’ordre contre la Poésie, qui lui refusent le droit d’exister, à cette sublime fille de la tête humaine, et qui la traitent comme une amusette de peuple enfant, comme un polichinelle cassé.

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