Voltaire a fait faire des progrès à l’art dramatique, quoiqu’il n’ait point égalé la poésie de Racine. […] Bossuet et Fénelon doivent sans doute être cités comme les premiers qui aient donné l’exemple de réunir dans un même langage tout ce que la prose a de justesse, et la poésie d’imagination. […] L’harmonie du style en prose a fait de grands progrès ; mais cette harmonie ne doit point imiter l’effet musical des beaux vers : si l’on vouloir l’essayer, on rendrait la prose monotone, on cesserait d’être libre dans le choix de ses expressions, sans être dédommagé par la consonance de la poésie versifiée.
Le nombre de la poésie relève une pensée commune. […] C’est lorsque Hélène passe devant les vieillards troyens, et qu’ils se récrient, qu’Hélène est belle ; et c’est lorsque l’Arioste me décrit Angélique, je crois, depuis le sommet de sa tête jusqu’à l’extrémité de son pied, que malgré la grâce, la facilité, la molle élégance de sa poésie, Angélique n’est pas belle. […] Tout ce que je sais, c’est que j’ai bien fait de me méfier de mon jugement ; c’est que Virgile a tout gâté lorsqu’il a traduit cet endroit par ces vers où il ne reste presque pas le moindre vestige de la poésie et des images d’Homère : parva metu primo, … etc. j’aime mieux le plat latin du juif helléniste, qui a dit de l’ange exterminateur des premiers-nés de l’égypte : stans replevit omnia… etc. ah !