Après avoir souri avec un grand poète comme Arioste, on rit avec un grand comique comme Molière. […] Les poètes, selon moi, portent le modèle de leur héros en eux-mêmes ; ils ne peignent jamais bien que ce qu’ils ont eux-mêmes éprouvé. […] et comment un poète tragique moderne ne s’en empare-t-il pas pour faire trembler, frémir, applaudir tout un peuple ?... — Je vous arrête, jeune homme, me dit le professeur ; vous oubliez qu’un poète de votre propre pays l’a fait. Ce poète, c’est Voltaire ; Voltaire, l’adorateur et souvent le plagiaire heureux ou malheureux de l’Arioste.
C’est quand ils sont le plus en possession de leur pensée qu’ils sont le plus jeunes, les grands poètes ! […] C’est la vie qui y est encore plus belle que la mort, — la mort plus belle que tout, pourtant, dans les grands poètes, et surtout dans un poète comme Shakespeare ! […] Mais la prétention du traducteur, interprète du grand poète anglais, est bien autrement considérable. […] Et c’est tout cela qui fait de Shakespeare un poète familial, comme il est un poète universel ! […] L’immense moraliste et l’immense poète a eu une bien autre visée.