Il y a eu en effet, dans tous les temps, deux manières d’entendre les rapports de la philosophie et de la religion : ou bien nier la philosophie, la déclarer radicalement impuissante, c’est ce que font Tertullien, Luther, Pascal, Lamennais, et en général les croyants absolus et extrêmes ; ou bien la considérer comme une préparation à la religion, un premier étage sur lequel s’édifiera plus tard le dogme chrétien : telle est la pensée de saint Clément d’Alexandrie, de saint Augustin, de saint Anselme, de Fénelon, et dans l’Église protestante, de Mélanchton et des esprits tempérés. […] Une morale qui rend les enfants responsables des fautes de leur père est une morale que l’on peut appeler barbare ; une théologie qui encore aujourd’hui considère les Juifs comme responsables du péché de leurs ancêtres, une théologie qui enseigne un Dieu poursuivant les enfants jusqu’à la troisième et quatrième génération est une théologie farouche dont l’atrocité primitive est recouverte par les prodiges de charité qui plus tard ont fleuri sur cette racine amère.
Il a tort et grand tort de nommer en toutes lettres son ennemi Boursault, comme il aura tort, plus tard, de mettre l’abbé Cottin tout vif dans Les Femmes savantes ; il ne faut pas tuer les gens à coups de massue, un petit coup d’épingle, à la bonne heure ; et puis si vous tuez votre homme aujourd’hui que vous restera-t-il le lendemain ? […] Mademoiselle Duparc, envieuse et jalouse, c’était la prude Arsinoé ; mademoiselle de Brie, indulgente et dévouée, sera plus tard la sage Éliante ; mademoiselle Molière, vive, agaçante, coquette, est déjà Célimène, et le Misanthrope, ne le reconnaissez-vous pas dans Molière ?