C’est ainsi qu’elle entrait plus tard dans la mienne, par les fenêtres au couchant de ma chambre dans la maison de mon père, ouvrant sur des toits éclaboussés d’une morne lumière et attristés encore par le roucoulement de pigeons blancs qui bordaient les tuiles de la rue voisine. […] Plus tard il se séparait en deux parts en écrivant ses poèmes et ses romans ; l’une de ces deux parts regardait penser et écrire l’autre, afin de pouvoir la diriger et la juger. […] De ce pacte imaginaire, que les peuples enfants ont cru quelquefois réalisé, sont nées les légendes innombrables qui ont épouvanté le moyen âge et amusé plus tard les âges suivants. […] Ces conversations tiennent au sujet, comme on le verra plus tard, par le tableau de la candeur des jeunes filles de la bourgeoisie qui tremblent d’être séduites ou compromises aux yeux de la petite ville si elles se laissent approcher par la mauvaise compagnie. […] D’abord il prouve l’innocente et naïve confiance de la jeune fille ; puis il annonce au spectateur qu’elle a un frère chéri au service, frère dont la mort accidentelle sera bientôt un crime de son amour pour Faust ; puis enfin cette tendresse pour sa petite sœur, qu’elle élève si maternellement au berceau, prépare un contraste terrible avec le crime de délire qui lui fera plus tard sacrifier à la fièvre le propre fruit de ses entrailles.
VI Mais je vis, quelques années plus tard, dans une autre maison, et dans une autre circonstance, combien ce qui était sérieux lui inspirait de gravité, et combien sa conscience lui inspirait de répulsion contre le mal. […] David fit plus tard un buste de Balzac. […] « Mon frère nous accompagnait aussi quelquefois au bal ; mais, s’y étant laissé tomber malencontreusement, malgré les leçons qu’il recevait d’un maître de danse de l’Opéra, il renonça à la danse, tant le sourire des femmes qui suivit sa chute lui resta sur le cœur ; il se promit alors de dominer la société autrement que par des grâces et des talents de salon, et devint seulement spectateur de ces fêtes dont plus tard il utilisa les souvenirs. […] Mon frère avait déjà fait plusieurs séjours chez lui ; la spirituelle conversation de ce bon vieillard, ses curieuses anecdotes sur l’ancienne cour, où il avait obtenu de grands succès, les encouragements qu’il donnait à mon frère, dont il était le confident, avaient fait naître une telle affection entre eux qu’Honoré appelait plus tard l’Isle-Adam son paradis inspirateur. […] Il avait quitté l’avoué et le notaire chez lesquels on l’avait placé : il n’y avait gagné que les connaissances techniques de législation pratique qui lui furent utiles plus tard dans ses ouvrages, et le profond dégoût de ces occupations mercenaires que sa belle imagination dédaignait ; il commençait à penser à la gloire, premier et dernier rêve des grands cœurs.