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703. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

Mahmoud pourvut à ce que personne ne pût l’interrompre dans son travail, en défendant la porte à tout le monde, à l’exception d’un seul ami et d’un esclave chargé du service domestique. […] Quand il eut atteint l’âge de dix ans, personne dans son pays n’osait lutter contre lui. » Il se distinguait, à première vue, de tous les Turcs d’alentour ; il devenait manifeste qu’il était issu d’une autre race. […] Ne reste pas avec les Turcs ; je ne connais personne dans l’Iran qui ait des épaules et des bras comme toi. […] Malgré la colère que ce récit inspire involontairement contre Roustem, le poète n’accuse personne : Le souffle de la mort, dit-il, est comme un feu dévorant : il n’épargne ni la jeunesse ni la vieillesse. […] Pour moi, la moralité que je déduirai ici sera à la moderne, tout étroite et toute positive : c’est qu’il convient que l’impression de ce grand livre où se trouve ce bel épisode, et d’autres épisodes encore, se remette en train au plus vite et s’achève, et que les contrariétés, les ennuis qui, il y a huit cents ans, sous le régime du sultan Mahmoud, ont traversé la vie et l’œuvre du poète Ferdousi, ne continuent pas aujourd’hui de le poursuivre dans la personne de son savant éditeur et traducteur, qui mérite à la fois si bien et de lui et de nous.

704. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

Pour bien connaître un critique, pour se retracer au vrai sa physionomie et sa personne, il ne suffit pas de lire ses écrits. […] C’est énerver, prétend Geoffroy, la critique littéraire que d’aller chercher des circonlocutions pour exprimer des défauts qu’on peut très clairement spécifier d’un seul mot : appliqué à la personne, ce mot serait une injure ; appliqué à l’ouvrage, c’est le mot propre.  Et ce mot, il le lâche aussitôt sans plus songer à sa distinction entre la personne et l’ouvrage : Quelques-unes de mes expressions, dit-il encore, leur paraissent ignobles et triviales : je voudrais pouvoir trouver des mots encore plus capables de peindre la bassesse de certaines choses dont je suis obligé de parler. […] Dans un de ses piquants articles sur M. de Pradt, il traduisit un jour le badin archevêque en personne, et la visite qu’il avait reçue de lui à son quatrième étage, et les injures, les injonctions, les gesticulations et les anathèmes du très peu édifiant prélat ; c’est une excellente petite pièce. […] La personne, non moins que l’écrivain, méritait ce choix.

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