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3018. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

il nous paraît moins digne de pitié que Don Juan, quand il s’écrie, sous ces beaux arbres si doucement agités par le zéphyr printanier : — « Je crois que deux et deux a sont quatre, et que quatre et quatre sont huit. » Pour ce qui est de la partie bouffonne des deux drames, elle n’est pas moindre dans l’Hamlet que dans le Don Juan. […] » — Lauzun, en vrai compère de mélodrame, regardait madame de Montespan et disait : — « Tisse bien la toile, tisse ; la plus forte araignée dévorera l’autre ; un de nous deux doit succomber. » Il paraît que dès le premier jour de ce triste drame, toutes ces belles inventions furent vivement répudiées par la saine partie du public anglais. — Il y a de beaux et justes esprits au sommet de cette nation qui ne pouvaient pas tolérer ces abominables mensonges, et ces honteux démentis donnés à la majesté de l’histoire !

3019. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

Louis XIV avait assis la maison de Bourbon sur le trône d’Espagne ; l’Angleterre avait anéanti la puissance navale des Espagnols ; la Hollande était redevenue indépendante ; les Pays-Bas n’étaient plus qu’une colonie politique presque détachée de l’empire ; la Prusse avait scindé l’Allemagne en deux influences hostiles l’une à l’autre ; Frédéric II avait emporté la Silésie, une partie de la Pologne et de grands lambeaux de l’Allemagne du Nord dans sa tombe ; la Russie, agrandie des trois quarts de la Pologne et d’immenses provinces en Orient, comptait soixante et dix millions de sujets, presque tous belliqueux, prêts à peser sur Vienne du même poids que les Ottomans y avaient pesé jadis ; l’Italie méridionale appartenait, avec Naples et l’Espagne, à la maison de Bourbon ; Venise, Gênes et la maison de Savoie possédaient les provinces les plus militaires et les plus maritimes de l’Italie du Nord ; le Tyrol et le Milanais étaient seuls restés annexés à l’Autriche, plutôt comme des têtes de pont sur les plaines lombardes que comme des possessions irrévocables et solidement incorporées à la monarchie autrichienne ; les petites puissances allemandes limitrophes du Rhin étaient une confédération molle et inoffensive qui donnait autant d’embarras que de poids à la cour de Vienne.

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