Bonsoir le plaisir de cette nuit, et, les nerfs montés, il nous vient des idées d’exil volontaire, et la tentation d’aller fonder en Belgique un journal, où nous montrerons aux gouvernants du moment, que nous avons certaines qualités de pamphlétaires. […] * * * — Tous ces temps-ci, détente complète de l’activité physique et morale ; une somnolence qui irait à des nuits de dix-huit heures ; — dans l’éveil les yeux paresseux à voir, à observer ; — notre regard, sans notre pensée, feuilletant les livres et se traînant de l’un à l’autre ; — un grand effroi de faire moins que rien ; — la tête vide et pourtant lourde ; — le sang comme envahi par la lymphe ; — un lâche ennui ; — le remuement de la cervelle et du corps aussi durs pour nous que pour l’aï, qui passe une journée à se dérouler de son arbre ; — un état de l’âme sur lequel tout passe sans la secouer : les distractions, l’orgie, les grattements de vanité. — C’est la maladie qui vient aux activités retraitées, aux têtes qui restent trop longtemps à se reposer, à nous qui, depuis cinq mois, ne vivons pas dans une œuvre et pour une idée. […] Tout cela coulant, débordant, en une nuit d’été, de cet éloquent toqué du passé et de l’antiquité, dans l’ombre d’un mylord qui roule au petit pas, à travers le bois de Boulogne, avec un cocher dormant sur le siège, et dont il dit : « Ne le dirait-on pas accoudé sur un triclinium ? […] * * * — A-t-on jamais songé à l’être moral que doit faire le fils d’un restaurant, conçu aussitôt après que son père a donné l’ordre aux garçons d’ajouter le numéro du cabinet à l’addition des soupers de la nuit ? […] » * * * — Je ne suis pas aussi heureux que ces gens qui portent, comme un gilet de flanelle qu’ils ne quittent même pas la nuit, la croyance en Dieu.
L’auteur de La Nuit a, si j’ose dire, des états d’âme de rechange ! […] Elle pare et ennoblit tous ses poèmes ; mais aussi leur impose parfois une allure un peu guindée, nuit à leur simplicité, à leur bonne grâce : la plupart manquent d’émotion. […] Épuisé. — Nuits d’Épiphanie. […] Bruxelles, Lacomblez, 1893. — La Nuit. […] La Nuit, « Anatomie ».