Et, au fur et à mesure qu’on déplace une pièce, l’échiquier m’apparaît en entier avec ce nouveau changement. […] « Lorsque je ferme les yeux, dit-il, et que je baisse un peu la tête, je fais apparaître une fleur au milieu du champ de la vision ; cette fleur ne conserve pas sa première forme, elle s’ouvre, et de son intérieur sortent de nouvelles fleurs, formées de feuilles colorées et quelquefois vertes. […] Je ne puis fixer une forme, mais le développement de nouvelles fleurs continue aussi longtemps que je le désire, sans variation dans la rapidité des changements. […] Parfois, dans la maladie, un poids passe du premier plateau dans le second qui emporte le premier, et nous avons une hallucination proprement dite ; alors on est obligé de remettre de nouveaux poids, c’est-à-dire des sensations nouvelles, dans le premier, pour lui prendre sa prépondérance. […] Un jour, Balzac décrit avec enthousiasme chez Mme Delphine Gay un superbe cheval blanc qu’il veut donner à Sandeau ; quelques jours après, il croit l’avoir donné effectivement, en demande des nouvelles à Sandeau lui-même ; probablement, devant l’étonnement et les dénégations de son ami, il cessa de croire à son cadeau.
Et cependant, au milieu de ce tourbillon nouveau et continuel, entièrement libre de ma personne, avec ma fortune, mes dix-huit ans et une figure avenante, je trouvais au fond de toutes ces choses la satiété, l’ennui, la douleur. […] Il revint à Turin ; il essaya quelques scènes de tragédie, alla passer quelques mois à Asti pour y cuver ses connaissances nouvelles, et s’aperçut qu’il ne savait rien. […] Je passai et repassai par Sienne, où je revis mon ami Gori, qui ne me détourna pas de ces nouvelles chaînes, dont j’étais plus d’à moitié enveloppé ; aussi mon retour à Florence acheva bientôt de me les river pour toujours. […] « Deux jours après le mariage, le soir de Pâques, les nouveaux époux quittèrent le château de Macerata et se dirigèrent à petites journées vers Rome, où ils firent leur entrée le 22 avril. […] On craignait en un mot que le partisan de 1745 ne retrouvât sa vigueur juvénile pour cette expédition d’un nouveau genre ; il fallait donc être en mesure d’empêcher un coup de main.