Ici, au contraire, en nous arrêtant un instant avec cette personne d’une plume si fine et si légère, nous ne serons en rien distraits du point que je tiens à indiquer avant tout, et que ceux qui la connaissaient le mieux désignaient, en la montrant, sous le nom d’urbanité pure. […] Ceci nous conduit à l’examen d’une question qui a été déjà traitée, et à laquelle le nom de Mme de Caylus s’est trouvé mêlé dès l’origine. […] Avoir des mœurs en ce sens délicat, qui est celui des honnêtes gens, c’est ne pas s’en croire plus qu’à personne, c’est ne prêcher, n’injurier personne au nom des mœurs. […] Voici une des plus jolies lettres, où elle parle d’elle-même sous le nom de la petite nièce, et où elle réclame de sa tante, et sur tous les tons, la faveur de la voir un peu plus souvent : Je réfléchis sur votre semaine, et je ne la saurais trouver bien ordonnée, qu’il n’y ait un peu plus de la petite nièce : pourquoi n’en pas vouloir quelquefois avec la petite famille ?
Celui-ci, qui était déjà ce qu’il sera toute sa vie, répondit hardiment « qu’on ne cassait pas un homme de son nom ». […] Il s’y distingue, mais il y oublie trop celle qui le suit de ses vœux, de ses inquiétudes, et qui, au milieu de tous les torts dont elle est l’objet, reste glorieuse de son nom et fière de sa gloire : Mon inquiétude augmente chaque jour, en même temps que votre inexactitude, lui écrit-elle (25 juillet 1717), et je suis aussi constante à me tourmenter que vous l’êtes à me négliger. […] Par un tact qui est propre aux femmes, elle se rejette sur la parenté et n’appelle plus que cousin celui qu’elle voulait nommer d’un nom plus doux : Adieu, mon cher cousin ; rendez-en à une personne qui n’en rendra jamais qu’à vous, mon cœur vous étant sacrifié sans partage. […] Pour elle, elle est prête à se soumettre à toutes les absences, à toutes les privations, pour l’honneur et l’accroissement de réputation de celui qu’elle aime : « Quand on porte de certains noms, pense-t-elle, et qu’on est née avec la gloire de le sentir, on prend patience sur les choses auxquelles il n’y a pas de remède. » Comment Bonneval ne sut-il pas apprécier un pareil cœur, une distinction si vive et si pure, un choix et un don si absolus ?