/ 1492
386. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre III. Des idées générales et de la substitution à plusieurs degrés » pp. 55-71

En effet, ce n’est point ce cercle tracé que nous considérons ; il n’est point notre objet, il n’est que notre aide ; nous concevons à propos de lui quelque chose qui diffère de lui, qui n’est ni blanc, ni tracé sur fond noir, ni de tel rayon, ni d’une rondeur inexacte […] Quand nous apprécions une distance, il faut bien qu’elles soient présentes ; et pourtant nous ne les démêlons plus, quelque envie que nous en ayons ; elles sont pour nous comme si elles n’étaient pas ; il nous semble que nous connaissons, directement et sans leur entremise, la position que seules elles dénotent ; si parfois elles nous frappent, c’est en s’exagérant, par exemple lorsque, obligés de lire de trop près ou de trop loin, nous éprouvons dans les muscles de l’œil une fatigue notable ; hors de ces cas, elles sont invisibles et comme évanouies. — Pareillement, un compositeur qui vient de lire un air d’opéra ne se souvient pas des croches, des blanches, des clefs, des portées, et de tout le barbouillage noir sur lequel ses yeux se sont promenés, mais seulement de la série des accords qu’intérieurement il a entendus ; les signes se sont effacés, les sons seuls surnagent. — Quand il s’agit de mots, nous pouvons marquer les divers degrés de cet effacement.

387. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Du haut des sombres marches, Du noir pont de l’abîme on entrevoit les arches ; Va ! […] Sur ton muet sépulcre et tes os consumés Qu’un autre verse ou non les pleurs accoutumés ; Que ton siècle banal l’oublie ou te renomme ; Moi, je t’envie, au fond du tombeau calme et noir, D’être affranchi de vivre, et de ne plus savoir La honte de penser et l’horreur d’être un homme.

/ 1492