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32. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Premiere partie. » pp. 12-34

S’il est coupable, pourquoi donc la gloire demeure-t-elle attachée à ses pas & devient-elle le prix de sa noble audace ? […] Avouons-le cependant ; l’indigence est affreuse, un ancien Poëte nous la représente sous l’image d’une femme échevelée, abandonnée sur un rocher désert, qui tantôt lutte contre le désespoir, tantôt mesure l’abîme effroyable ou elle va se précipiter ; mais l’indigence n’a jamais surpris l’homme de Lettres laborieux, il pourra être pauvre, & ce sera là le gage de ses vertus, & de la noble fierté de son ame. […] Donnerai-je ici la liste de ces beaux génies persécutés par elle, & qui contens dans leur noble independance ont rejetté tout esclavage, & ont opposé une ame inébranlable aux coups de l’adversité. […] Sans l’amour sacré de la liberté & d’une noble vengeance, où auroit-il trouvé le courage d’écrire l’histoire de monstres paîtris de sang & de boue ? […] Pourquoi enfin, leur interdisant toute noble carrière, leur envions nous encore les jeux & les plaisirs de l’esprit ?

33. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

D’autres, des brunes ; Zénon de Citium, Épictète, Marc-Aurèle, gardent, parmi les fantômes que le moindre souffle emporte recourbés, une noble précision et un puissant équilibre immobile. […] C’est elle qui pousse d’autres imbéciles de la force de Bourget à reprocher à Jésus les cruautés de tels de ses disciples, ou à diffamer le noble Épicure parce que des porcs se vantèrent d’appartenir à son troupeau. […] Barbey d’Aurevilly, écrivain et poseur admirable, noble sans doute, mais plus hautain que noble, et puissant par l’image, et par l’expression trouvée, et par le rythme bruyant et empanaché, et par la verve méprisante, mais dont la pensée est un squelette dont on entend à peine le pauvre cliquettement sous les pourpres triomphales qui le drapent, reproche continuellement lui aussi aux non-catholiques de ne point penser. […] Celui qui semblait pouvoir être le noble pamphlétaire de sa propre conscience est devenu bassement le pamphlétaire d’un parti. […] Godard le tuait, il avait — choisissant peut-être la pénitence la plus répugnante au noble et clair latin qu’il est — suivi à Ligugé le grossier flamand Huysmans, alourdisseur, enlaidisseur et embreneur de toute la mystique catholique.

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