Töpffer, qui déjà n’était pas du tout un inconnu pour ceux qui avaient fait le voyage de Suisse et qui avaient feuilleté au passage les spirituels albums humoristiques nés de son crayon. […] Rodolphe Töpffer est né à Genève, le 17 février 1799, en nonante-neuf, comme on y dit encore ; il se trouve antérieur de quelques années, par la date de sa naissance, à cette génération romantique qui, vers 1828, se remua à Genève ou à Lausanne, à laquelle appartiennent les deux poëtes Olivier de là-bas, et d’où nous sont venus ici Imbert Galloix pour y mourir, et M. […] « Si vous avez jamais voyagé à pied, n’avez-vous point senti naître en vous et croître avec les journées et les services cette affection pour le sac qui préserve vos hardes, pour le bâton, si simple soit-il, qui a aidé vos marches et soutenu vos pas ? […] Quoi qu’il en soit, voilà une idylle véritable, née du pays, fille du Salève, et digne de se placer modestement à la suite de toutes celles qui ont fleuri, depuis Nausicaa, la première de toutes et la plus divine, jusqu’à Hermann et Dorothée. […] En achevant cette lecture d’un auteur chez qui la littérature est née tout entière des habitudes morales et du foyer de la vie, est-ce une conclusion purement critique que je suis tenté d’y rattacher ?
L’indéfini, qui naît de la combinaison humaine et divine de l’infini et du fini, leur échappe. […] N’est-ce pas misère que d’y naître et d’y végéter forcément, dépendant de tous par l’enfance et par la vieillesse, ces deux maladies organiques de l’homme, qui lui prennent les deux tiers de sa vie ? […] N’est-ce pas misère que de naître forcément dans telle patrie ou dans telle autre, soumis à des lois qu’on n’a pas faites et contre lesquelles on ne peut que protester ? […] La jouissance : un peu plus de chair, un peu plus d’appétits, un peu plus de moyens d’y satisfaire ; un peu plus de vie, on ne sait pas comment : car, si nous vivions indéfiniment sans maladie et sans mort, que deviendraient les innombrables générations qui demandent à Dieu de naître à leur tour, et qui, trouvant la place prise, rentreraient dans le néant avant d’être nées ? Et où serait la justice, pour ceux qui, étant nés et étant morts avant l’ère de nos utopistes immortels, n’auraient pas bénéficié de notre perfectibilité indéfinie ?