Alors on se promene sans crainte de rencontrer le soleil ; & des musiques de toutes parts viennent charmer les oreilles, & faire resonner les échos. […] Elle chanta lorsqu’elle fut lasse de jaser, & sans ce brouhaha qu’emploient les Anglais pour se réjouir, sans cette musique affectée, dont les italiens sont si prodigieusement amateurs, sans ces efforts qui remuent les Allemands, nous jouîmes le plus agréablement du monde de la sérénité de notre ame, & de celle du jour, avec l’intention de recommencer la même partie, & l’assurance d’en saisir au plutôt l’occasion. […] Nous vîmes arriver jusqu’à nous un de nos auteurs à la mode, où tout est décousu, où des phrases posées çà & là, forment une bigarrure qu’on prendroit pour un ouvrage en musique.
Il veut prouver qu’il y a, ou plutôt qu’il y a eu, un art catholique, symbolique et mystique, très supérieur, surtout par l’expression, à tous les arts profanes, antiques ou nouveaux ; il étudie l’architecture, d’après la cathédrale de Chartres, la peinture d’après les primitifs et surtout Fra Angelico, la musique d’après le plain-chant grégorien, la mystique et la symbolique, d’après les saints, les théologiens et les compilateurs du moyen âge ; comme centre au roman, une page de l’histoire d’un écrivain converti qui tente le renoncement et commence par vouer tout son talent à la défense de l’art religieux ; le sentiment est représenté par des effusions d’amour pieux versées aux pieds de Notre-Dame ; les personnages, hormis peut-être celui d’une servante dévote et mystique, silhouette curieuse, sont de la psychologie la plus rudimentaire ; le directeur de conscience, l’abbé Gévresin, apparaît d’une nullité extraordinaire, presque phénoménale ; l’abbé Plomb est un archéologue de province sans caractère particulier qu’une mémoire baroque où se sont logées, à l’exclusion de toute notion sensée, les seules singularités de la symbolique et la seule histoire de la cathédrale de Chartres ; non moins versé dans le même genre de connaissances, le héros du livre, Durtal, exhibe, en plus, une âme de jeune communiant, et l’esprit sarcastique d’un critique d’art, aigre quoique dévotieux, partial quoique renseigné. […] Voilà sur quelle parole se serait fondée la famille nouvelle si l’opulence verbale du catholicisme païen n’avait su entourer de phrases sensuelles la parole brutale de l’apôtre juif ; l’Église substitua à l’idée de πορνεια la musique d’alcôve du Cantique des Cantiques. […] Les sentimentalités récalcitrantes trouveront dans la musique un refuge suprême.