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462. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Il y a des sensations composées, et c’est la raison pour laquelle il n’y a de beaux que les objets de la vue et de l’ouïe. écartez du son toute idée accessoire et morale, et vous lui ôterez la beauté. […] Combien de philosophes, faute de ces observations si simples, ont fait à l’homme la morale des loups, aussi bêtes en cela que s’ils avaient prescrit aux loups la morale de l’homme ! […] La morale se renferme donc dans l’enceinte d’une espèce… qu’est-ce qu’une espèce ?… une multitude d’individus organisés de la même manière… quoi l’organisation serait la base de la morale ? […] Je m’en revenais donc, et je pensais que s’il y avait une morale propre à une espèce d’animaux et une morale propre à une autre espèce ; peut-être dans la même espèce y avait-il une morale propre à différens individus ou du moins à différentes conditions ou collections d’individus semblables, et, pour ne pas vous scandaliser par un exemple trop sérieux, une morale propre aux artistes, ou à l’art, et que cette morale pourrait bien être le rebours de la morale usuelle.

463. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Bernardin de Saint-Pierre »

Mais cette façon d’envisager la nature, dont le discours du grand-prêtre Génius est demeuré l’expression la plus philosophique en notre littérature, a plutôt abouti à des conclusions relâchées de morale et à une poésie de plaisir ; il n’en est sorti aucune grande peinture naturelle. […] Bernardin, dans ses voyages, avait toujours beaucoup écrit ; il composait des mémoires pour les bureaux, il rédigeait des journaux pour lui ; arts, morale, géographie, affaires du temps, il tenait compte de tout. […] Grimm, le spirituel chargé d’affaires littéraires de huit souverains du Nord, avait beau écrire à ses patrons que l’ouvrage n’était qu’un long recueil d’églogues, d’hymnes et de madrigaux en l’honneur de la Providence, la vogue en cela se retrouvait d’accord avec la morale éternelle. […] Le point de vue des causes finales n’est jamais fécond pour la science, et rentre tout entier dans la poésie, dans la morale, dans la religion ; ce ne peut être au plus que le moment de prière du savant, après quoi il faut qu’il se remette à l’examen, à l’analyse. […] A l’École normale, fondée en 95, Bernardin et Saint-Martin se retrouvèrent, l’un comme professeur de morale, l’autre comme élève-auditeur.

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