Sa mère, qui était morte en le mettant au monde, était sœur de la duchesse de Choiseul, femme du Premier ministre. Il se trouvait donc tout initié à ce monde des Choiseul, des Stainville, et il y fit ses premières armes, ses premiers ravages. […] Ayez quelques attentions pour lui, mais ne vous en gênez pas le moins du monde. […] Il avait vingt-huit ans alors, et passait dans ce monde oisif pour un personnage extraordinaire, et dont la destinée avait été des plus bizarres. […] Mais ici on a droit d’interrompre la personne du monde qui juge de la sorte si à la légère, et de lui dire : « Non, madame, il n’est au pouvoir d’aucun homme, si élevé qu’il soit par son nom et son influence, de récuser ainsi et de mettre à néant d’un trait de plume des indiscrétions, fussent-elles scandaleuses et préjudiciables à tout un ordre de la société.
À travers ces premiers mécomptes et ces diverses écoles, son éducation s’achevait, il apprenait la vie et le monde réel. […] Sayous, un autre parrain littéraire que Linguet ; mais on ne choisit guère plus son parrain que ses parents, et on entre dans le monde, et même dans le monde littéraire, comme on peut. […] Il se méfia à l’instant de cette monarchie délabrée et dissolue, où, sur des lits de roses et tout en partant pour l’Opéra, on se flattait qu’il n’y avait qu’à promulguer quelques principes abstraits pour assurer l’affranchissement universel et la félicité du monde. […] De loin en loin il s’élève quelques hommes d’État supérieurs aux événements qu’ils savent prévoir, préparer et conduire (Frédéric le Grand, Franklin, par exemple) ; mais la routine ou la nécessité gouvernent ordinairement le monde, et la vieille Europe renferme malheureusement plus d’ouvriers que d’architectes. […] On voit que Mallet connaissait son monde de l’émigration : c’étaient bien en 1793 les mêmes gens qu’on a vus rentrer en 1814, pour retomber en 1830.