L’érudition a démenti bien des assertions données comme irréfutables dans l’Essai sur les mœurs ; le Dictionnaire philosophique a été convaincu d’ignorance sur bien des points : la prose historique et la prose philosophique de Voltaire n’en demeurent pas moins des modèles de clarté. […] Hugo d’après quelle autorité il appelle les aigles dans la plaine de Paris, ni s’il compte sur un soulèvement pour convertir la plaine en montagnes, car il lui est permis d’ignorer les mœurs des oiseaux de proie ; mais je ne puis lui pardonner son berger accroupi.
Préface de l’éditeura Anne Gourio 2012 « Non, Ghil, l’on ne peut se passer d’Eden ». Le mot par lequel Mallarmé répond, en 1888, au jeune auteur du Traité du Verbe est à la fois le point de rupture retentissant entre symbolisme et poésie scientifique, et la clé de voûte des « souvenirs » que Ghil publie en 1923. C’est autour de l’« Eden » mallarméen que s’organisent les chapitres de ce qui semble d’abord une simple chronique de la vie littéraire des 1880 et 1890, mais s’avère bientôt le récit de la confrontation prestigieuse de son auteur aux tenants de l’idéalisme poétique. Sans doute le contexte d’écriture des Dates et les Œuvres permet-il d’en éclairer le véritable l’enjeu. En 1923, René Ghilbert n’a plus que deux années à vivre ; depuis le début du siècle, l’auteur du Traité du Verbe est pour ainsi dire passé dans l’ombre : certes les volumes successifs de L’Œuvre, équivalent ghilien du fameux Livre mallarméen, ont vu peu à peu le jour, certes Ghil a consolidé les fondements de sa théorie (De la Poésie scientifique (1909), La Tradition de poésie scientifique (1920)), il a même eu la satisfaction de voir naître les premiers travaux universitaires issus de sa conception de la poésie (C-A.