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1172. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIIe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset » pp. 409-488

Mais s’il est beau de fleurir, il est plus beau de mûrir, il est plus beau de transformer sa mâle adolescence en forte virilité ; il est plus beau de découvrir des horizons plus sévères, plus tristes, mais plus vrais, sans pâlir et sans se détourner en arrière à mesure qu’on avance dans la route ; il est plus beau de voir, sans reculer et sans pleurer, les roses de l’aurore pâlir et sécher aux feux, et à la sueur du milieu du jour ; il est plus beau d’avancer toujours courageusement en teignant du sang de ses pieds les rudes aspérités du chemin. […] Il t’a chanté ce que tu demandais qu’on te chantât, les seules choses que tu voulais entendre : la beauté de chair et de sang, le plaisir sans choix, le vin sans mesure, Qu’importe le flacon, pourvu qu’il ait l’ivresse ! […] L’âme d’un peuple n’est pas ce chiffre muet et mort à l’aide duquel il compte des quantités et mesure des étendues ; un calcul n’est pas une idée : la toise et le compas en font autant !

1173. (1739) Vie de Molière

On comprit alors qu’il peut y avoir de fort bonnes comédies en prose, et qu’il y a peut-être plus de difficulté à réussir dans ce style ordinaire où l’esprit seul soutient l’auteur, que dans la versification, qui par la rime, la cadence et la mesure, prête des ornements à des idées simples que la prose n’embellirait pas. […] Les fous y étaient aussi à la mode ; chaque prince et chaque grand seigneur même avait son fou ; et les hommes n’ont quitté ce reste de barbarie, qu’à mesure qu’ils ont plus connu les plaisirs de la société et ceux que donnent les beaux-arts. […] C’est une farce, mais toute de caractères, qui est une peinture naïve, peut-être en quelques endroits trop simple, des ridicules de la province ; ridicules dont on s’est beaucoup corrigé à mesure que le goût de la société, et la politesse aisée qui règne en France, se sont répandus de proche en proche.

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