Que si nous prenons d’autres écrits de M. de Chateaubriand, d’une date très rapprochée de celle qu’on répute la meilleure, par exemple les Mémoires sur le duc de Berry, ou encore les Études historiques, nous y retrouvons toutes les fautes de mesure et de goût qu’on peut imaginer : c’est que l’Aristarque ici lui a manqué. […] Le poète Gray a dit des mémoires en général « que, si l’on voulait se contenter d’écrire exactement ce qu’on a vu, sans apprêt, sans ornement, sans chercher à briller, on aurait plus de lecteurs que les meilleurs auteurs ».
À propos de ces perpétuels dérangements que les incartades de Voltaire apportaient dans l’existence de Mme du Châtelet, les bonnes âmes d’alors ne tarissaient pas ; on la plaignait hautement ; le président Hénault, un des meilleurs amis, écrivait un jour à Mme Du Deffand : « La pauvre Du Châtelet devrait faire mettre, dans le bail de toutes les maisons qu’elle loue, la clause de toutes les folies de Voltaire. […] Ce petit traité, qui renferme des réflexions fermes et hautes, des remarques fines, et rendues dans un style net et vif, avec un vrai talent d’expression, a un défaut : il est sec et positif ; il a ce cachet de crudité qui déplaît tant au milieu des meilleures pages du xviiie siècle, et qui fait que la sagesse qu’on y prêche n’est pas la véritable sagesse.