» Que manque-t-il à ce tableau du bonheur facile d’un paysan d’Ustica, si ce n’est le contraste tacite avec l’opulence inquiète de Mécène ? […] Mécène, en les lisant, enviait Horace, car le laboureur de Sabine, c’était évidemment Horace lui-même ; il ne lui manquait que la chaste épouse et les enfants, ces deux âmes du foyer, ces richesses du pauvre ; mais nous avons vu qu’Horace, dans l’été de sa vie, ne les avait pas méritées ; il avait préféré le plaisir au bonheur : son isolement l’en punissait. […] Voyez comme il commence sa troisième épître à Mécène, avant de se laisser glisser, comme sur une pente, à des considérations contre l’ambition, l’orgueil et le luxe : « Je vous ai promis de n’être que cinq jours à jouir de ma liberté à la campagne, et voilà que je vous ai manqué de parole pendant tout le mois d’août ! […] Ils changent de ciel, et non d’âme, ceux qui naviguent au-delà des mers ; ce que tu vas chercher si loin, le bonheur, est ici : il est même à Ulubria. » XIX « Celui-là n’est jamais pauvre qui ne manque pas des choses nécessaires à la vie, continue-t-il dans la petite lettre en vers à Iccius.
Et ce manque absolu d’excès, cette infaillible exactitude qui se tenait toujours aux limites du vrai, du possible, de l’utile, c’est peut-être le point faible de ce grand et excellent homme : il fut trop paisiblement sage et sensé. […] De plus, dans les sermons de Bossuet, les contemporains estimèrent surtout la logique et la science ; et ils ne s’aperçurent pas, lorsqu’il se tut, qu’il leur manquât quelque chose, parce qu’au même instant Bourdaloue vint tenir sa place, et réaliser d’autant mieux leur idéal qu’il ne le dépassait pas438. […] Fénelon nous a tracé dans ses Dialogues sur l’éloquence un portrait de Bourdaloue prêchant, qui manque de bienveillance, mais non de vérité. […] Ils s’accordent à reprocher aux prédicateurs l’ambition et le bel esprit, l’ignorance de la religion et le manque de zèle.