Sa méthode est morale, non scientifique. — En quoi il ressemble aux puritains. — Sartor resartus. […] Et véritablement ce procédé, qui est l’imitation de la nature, est le seul par lequel nous puissions pénétrer dans la nature ; Shakspeare l’avait pour instinct et Gœthe pour méthode. […] Ils ont rendu sensibles des thèses morales, des périodes historiques ; ils ont fabriqué et appliqué des esthétiques ; ils n’ont point eu de naïveté, ou ils ont fait de leur naïveté un usage réfléchi ; ils n’ont point aimé leurs personnages pour eux-mêmes ; ils ont fini par les transformer en symboles ; leurs idées philosophiques ont débordé à chaque instant hors du moule poétique où ils voulaient les enfermer ; ils ont été tous des critiques1421, occupés à construire ou à reconstruire, possesseurs d’érudition et de méthodes, conduits vers l’imagination par l’art et l’étude, incapables de créer des êtres vivants, sinon par science et par artifice, véritables systématiques qui, pour exprimer leurs conceptions abstraites, ont employé, au lieu de formules, les actions des personnages et la musique des vers. […] Ils s’en sont servis partout comme d’une méthode, Hegel pour saisir la formule de toute chose, Gœthe pour se donner la vision de toute chose ; ils s’en sont imbus si profondément, qu’ils en ont tiré leurs sentiments intérieurs et habituels, leur morale et leur conduite. […] Ils ne savent marcher que pas à pas, en partant des idées sensibles, en s’élevant insensiblement aux idées abstraites, selon les méthodes progressives et l’analyse graduelle de Condillac et de Descartes.
Avant de commencer une campagne de critique, l’usage exige ordinairement que nous exposions devant le lecteur les motifs qui nous dirigent dans cette entreprise, la méthode dont nous userons au cours de nos commentaires, ou, pour mieux dire, notre façon personnelle d’envisager. […] Il nous est impossible d’employer une méthode définie, et il faut, coûte que coûte, se confier à sa sensibilité, à ses facultés de devination. […] Avec une semblable méthode, cependant, le critique ne se vouera plus à cette sorte de travail qui consiste à éplucher les textes, non sans pédanterie, à s’acharner sur quelque détail, tout en négligeant la pensée harmonieuse, l’ensemble général de l’œuvre dont il veut rendre compte. […] Au lieu d’être une école d’énergie, une méthode d’exaltation panthéistique, ce naturisme mal compris n’a réussi qu’à diminuer l’individu, à fixer son esprit sur des futilités. […] Et ce livre que certains esprits savent vénérer à l’égal du Discours sur la méthode et des Confessions, devait enflammer bientôt toute une brillante pléiade de jeunes hommes et les diriger vers de nouvelles voies.