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552. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

De ce qui précède, on peut donc inférer qu’à l’origine la loi de la succession des rimes a été dictée par la musique, et ce qui porte à croire cette assertion, c’est la phrase de Joachim du Bellay : « Il y en a qui fort superstitieusement entremeslent les vers masculins avec les vers féminins… afin que plus facilement on les peust chanter sans varier la musique pour la diversité des mesures qui se trouveroient en la fin des vers. » Ronsard, qu’on ne peut jamais trop consulter, s’exprime ainsi sur la rime dans son Art poétique : « La Ryme n’est autre chose qu’une consonance et cadance de syllabes, tombantes sur la fin des vers, laquelle je veulx que tu observes tant aux masculins qu’aux féminins, de deux entières et parfaictes syllabes, ou pour le moins d’une aux masculins pourveu qu’elle soit résonante et d’un son entier et parfaict. » Mais nulle part, il ne promulgue une règle à suivre sur l’alternance des rimes. […] Qu’on rime pour l’oreille et non pour les yeux ; qu’on ait le droit d’appareiller un singulier avec un pluriel, si du moins ils rendent tous deux le même son, car on ne voit pas pourquoi enfant et triomphants ne seraient pas des rimes admissibles, lorsque enfants et faons sont des rimes certainement admises ; qu’on se moque de la césure et de l’hémistiche, mais non de l’accent tonique ; qu’on se permette certains hiatus lorsqu’ils sont une liaison plutôt qu’un heurt ; qu’on supprime enfin les difficultés inutiles de la poétique, comme on le fait ailleurs pour celles de l’orthographe, mais de même qu’on doit respecter les lois primordiales de la syntaxe française, qu’on respecte aussi les lois organiques du vers français. Assouplissez-le, spiritualisez-le, mais ne le démembrez pas5. » Les réformes préconisées dans ces pages ne me paraissent nullement outrepasser les lois de la métrique française.

553. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

Lorsque dans une société la loi consacre des conditions inégales, personne n’est exempt d’insulte ; le grand seigneur, outragé par le roi, outrage le noble qui outrage le peuple ; la nature humaine est humiliée à tous les étages, et la société n’est plus qu’un commerce d’affronts. […] Un dernier effet de l’inégalité est la haine de la loi. Car la loi fonde l’égalité, en soumettant les mêmes fautes aux mêmes peines. […] Ce qu’il y a de merveilleux, c’est qu’entre les mains des juges, ils s’étonnaient et s’indignaient encore de l’insolence de la loi.

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